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Distribution sélective : liberté du fournisseur de déterminer le nombre d’opérateurs agréés et de contrôler leur localisation

Distribution sélective : liberté du fournisseur de déterminer le nombre d’opérateurs agréés et de contrôler leur localisation

La Chambre commerciale de la Cour de cassation affirme dans un arrêt du 7 juin 2016 la liberté pour le fournisseur, dans un système de distribution sélective, de déterminer la densité de son réseau en décidant du nombre d’opérateurs agrées et de leur localisation (Cass. com., 7 juin 2016, n°14-22.093, Hyundai).

En l’espèce, un constructeur automobile avait sélectionné trois distributeurs réparateurs dans une zone définie comme « l’agglomération lyonnaise« . Après la cessation d’activité de deux d’entre eux, le troisième avait ouvert deux nouveaux points de vente. Le constructeur a, par la suite, décidé d’agréer deux nouveaux distributeurs dans cette même zone géographique.

Le troisième distributeur, placé en liquidation judiciaire, a assigné le fournisseur en dommages-intérêts, lui reprochant d’avoir commis une faute en sélectionnant de nouveaux distributeurs dans la même zone géographique.

La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir énoncé que, dans un système de distribution sélective, le fournisseur détermine librement le nombre d’opérateurs qu’il décide d’agréer et contrôle la localisation de l’établissement principal des distributeurs qu’il agrée. Dès lors, « la nomination d’un nouveau distributeur est une prérogative [du fournisseur, lequel] étant libre dans la détermination de son numerus clausus et n’ayant pas à justifier de sa pertinence et de son objectivité, ne peut se voir reprocher d’avoir nommé un distributeur supplémentaire « sans justifications objectives ».

Cet arrêt peut être rapproché de l’affaire « Jaguar Land Rover » qui avait donné lieu à une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 14 juin 2012, C-158/11 ; Cass. com., 15 janvier 2013, n°10-12.734). La Cour de cassation avait suivi la CJUE en estimant que, dans le cadre d’un système de distribution sélective quantitative en matière automobile, il n’était pas nécessaire que les critères de sélection soient objectivement justifiés et appliqués de façon uniforme et non différenciée à l’égard de tous les candidats à l’agrément (cf. règlement d’exemption 1400/2002 du 31 juillet 2002 du secteur automobile partiellement remplacé par le règlement 461/2010 du 27 mai 2010).

Dans les systèmes de distribution sélective qualitative, en revanche, les critères de sélection doivent, en application de la jurisprudence « Metro » et des lignes directrices accompagnant le règlement d’exemption du secteur automobile, être objectifs, strictement nécessaires, fixés uniformément, portés à la connaissance des revendeurs potentiels et appliqués de manière non discriminatoire.

Malgré la généralité des termes employés par la Cour dans l’arrêt du 7 juin 2016, l’application de cette solution à l’ensemble des réseaux de distribution sélective en dehors du secteur automobile est incertaine (D. Ferrier, Concurrences, n°3-2016 ; N. Eréséo, Lettre de la distribution, CDE, juillet-août 2016, p.4).

Il découle de cet arrêt que la liberté de la tête de réseau n’est toutefois pas totale. Il semble en effet que le fournisseur aurait pu être condamné au paiement de dommages-intérêts sur le fondement de l’exigence de loyauté s’il avait imposé de « nouvelles conditions de concurrence défavorables ».

En l’espèce, les magistrats relèvent que le nombre global de distributeurs n’avait pas augmenté dans la zone géographique concernée et que les secteurs de chacun ne se recoupaient pas. La sélection de nouveaux distributeurs dans cette zone géographique ne modifiait donc pas, selon les magistrats, l’équilibre du contrat conclu.

Auteur

Amaury Le Bourdon, avocat en droit de la concurrence et droit de la distribution

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