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Domaine public : de nouveaux « droits acquis » ?

Grande serait la vertu de ceux dont la main gauche ignore ce que fait la main droite, mais à l’heure de la (difficile) dérèglementation de nombre d’activités, il est paradoxal de créer de nouveaux «monopoles» qui trouveront de surcroît leur siège sur le domaine public de l’Etat, des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics.


Alors que les principes d’inaliénabilité, d’incessibilité et d’imprescriptibilité du domaine public s’opposaient jusqu’à présent à l’existence d’un droit patrimonial sur ses dépendances notamment d’un fonds de commerce ou de la possibilité d’un bail commercial, la loi vient de reconnaître qu’un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l’existence d’une clientèle propre (CG3P, art. L.2124-32-1).

Sur le «modèle» des taxis, la loi institue un droit de présentation dans les «halles et marchés» au profit du commerçant titulaire de l’autorisation, mais aussi à ses «ayants-droits» en cas de décès, d’incapacité ou de retraite, en précisant que toute décision de refus de l’autorité gestionnaire du domaine doit être motivée.

Au-delà de la protection anecdotique du commerce «non sédentaire», la loi généralise ce principe au profit de «certaines activités commerciales» dont la liste n’est pas établie, et on peut se demander si elle concerne toutes les activités économiques qui se développent sur le domaine public et qui ne pouvaient jusqu’à présent se prévaloir de quelque «commercialité», et sans que l’on sache si cet avantage pourra, par exemple, s’étendre aussi aux gestionnaires privés de services publics à caractère industriel et commercial à l‘instar transports publics de voyageurs. La porte est donc ouverte à l’existence de nouveaux droits acquis remettant en cause une gestion domaniale somme toute d’inspiration libérale (Loi n°2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, art. 71 et 72).

Paradoxes de la commande publique

La simplification des candidatures à la commande publique est compensée par de nouvelles obligations pesant sur les candidats à l’obtention des contrats publics.

De nouvelles obligations

La loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes instaure de nouvelles interdictions de soumissionner pour les entreprises condamnées pour :

  • discrimination à raison du sexe (C. Pénal, art. 225-1),
  • méconnaissance de l’égalité professionnelle (C. Travail, art. L.1146-1).

Sont interdites de marchés publics les entreprises qui, au 31 décembre de l’année précédant celle au cours de laquelle a lieu le lancement de la consultation, n’ont pas mis en oeuvre l’obligation de négociation prévue à l’article L. 2242-5 du Code du travail et qui, à la date à laquelle elles soumissionnent, n’ont pas réalisé ou engagé la régularisation de leur situation. Cette négociation doit porter, chaque année, sur les objectifs d’égalité professionnelle et salariale entre les femmes et les hommes dans l’entreprise, ainsi que sur les mesures permettant de les atteindre.

Contrats concernés : marchés publics relevant du Code des marchés et de l’ordonnance du 6 juin 2005 ; contrats de délégation de service public, de partenariat (sauf collectivités territoriales) et de concession de travaux publics.

Entrée en vigueur : contrats conclus au 1er décembre 2014.

Un peu de simplification

Un décret du 26 septembre 2014 «simplifie» les dossiers de candidatures en précisant que les candidats ne sont pas tenus de fournir les documents et renseignements :

  • que le pouvoir adjudicateur peut obtenir directement par le biais d’un système électronique de mise à disposition d’informations administré par un organisme officiel ou d’un espace de stockage numérique, à condition que figurent dans le dossier de candidature toutes les informations nécessaires à la consultation de ce système ou de cet espace et que l’accès à ceux-ci soit gratuit ;
  • qui lui ont déjà été transmis dans le cadre d’une précédente consultation et qui demeurent valables.

En outre, lorsque le pouvoir adjudicateur demande un chiffre d’affaires annuel minimal donné, ce niveau minimal ne peut être supérieur à deux fois le montant estimé du marché ou du lot, sauf justifications liées à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution. S’il demande un niveau minimal supérieur à ce plafond, il le justifie dans les documents de la consultation ou dans le rapport de présentation.

Entrée en vigueur : procédures de passation lancées au 1er octobre 2014.

Un partenariat nouveau

Incrusté dans le Code des marchés publics (art. 70-1) et dans l’ordonnance du 6 juin 2005, le partenariat d’innovation a pour objet la recherche et le développement ainsi que l’acquisition de fournitures, services ou travaux innovants qui en sont le résultat. Sont innovants, les fournitures, services ou travaux nouveaux ou sensiblement améliorés qui répondent à un besoin qui ne peut être satisfait par des fournitures, services ou travaux déjà disponibles sur le marché. Ces contrats peuvent être passés selon une procédure négociée (cf. décret n°2014-1097 du 26 sept. 2014).

 

Auteur

Yves Delaire, avocat associé en droit des collectivités territoriales et de leurs groupements, et assiste les personnes publiques comme les personnes privées en droit des contrats publics (marchés, DSP, PPP, …), des services publics locaux, de la domanialité publique, de l’urbanisme et de l’environnement, de l’énergie, du tourisme et du sport.

 

Le Bulletin du Droit Public, CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon – Septembre-Octobre 2014
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