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Féminisation des organes de direction des sociétés : quelles nouvelles obligations en 2017 ?

Féminisation des organes de direction des sociétés : quelles nouvelles obligations en 2017 ?

Janvier 2017 constitue une nouvelle étape dans l’entrée en vigueur progressive de la loi du 27 janvier 2011 relative à « l’obligation de représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils d’administration et les conseils de surveillance ».

Le législateur français a été suivi dans sa volonté de promouvoir la mixité hommes-femmes par la Commission européenne qui a adopté le 14 novembre 2012 une proposition de directive relative à « un meilleur équilibre hommes-femmes parmi les administrateurs non exécutifs des sociétés cotées en bourse ».

2011 – 2016, 6 années qui n’ont que peu concouru à la promotion de la mixité dans les organes de direction

Le législateur a formulé le principe de la « recherche d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes » (articles L. 225-17, L. 225-69 et L. 226-4 du Code de commerce) qui a vocation à s’appliquer à l’ensemble des sociétés anonymes ou en commandites par actions, quelle que soit leur taille. Ce principe demeure toutefois, pour la plupart des entreprises françaises, au stade de la déclaration d’intention.

En effet, le législateur a entendu rendre la mixité obligatoire :

– immédiatement aux seules sociétés dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé, mais avec une progressivité peu ambitieuse :

  • les sociétés cotées, n’ayant aucune femme dans leur conseil à la date de la publication de la loi (soit au 28 janvier 2011), avaient l’obligation de nommer au moins une femme à la plus prochaine assemblée générale ayant à statuer sur la nomination d’administrateurs ou membres du conseil de surveillance ;
  • pour les sociétés cotées qui avaient déjà des femmes dans leurs conseils, la représentation de ces dernières ne devait pas être inférieure à 20 % à l’issue de la première assemblée générale ordinaire qui suivait le 1er janvier 2014.

– et, à terme, aux sociétés non cotées répondant à certains critères, savoir :

  • un nombre moyen d’au moins 500 salariés permanents, et
  • un montant net de chiffre d’affaires ou un total bilan d’au moins 50 millions d’euros.

Enfin, cette obligation est assortie de sanctions limitées:

  • en premier lieu, si le non-respect de ces dispositions entraîne, pour les seules sociétés concernées, la nullité de la nomination de l’administrateur ou du membre du conseil de surveillance intervenue en violation du texte légal, il n’emporte pas la nullité des délibérations auxquelles a pris part le membre irrégulièrement nommé.
  • en second lieu, la suspension du versement des jetons de présence. La suspension de ce versement doit figurer dans le rapport présenté par le conseil d’administration ou le directoire à l’assemblée générale (l’article L. 225-102-1 du Code de commerce).

Le rapport sur la parité dans les conseils d’administration et de surveillance des entreprises, remis le 10 février 2016 à Madame Marisol Touraine par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, permet de constater quelques progrès, mais dresse un premier bilan somme toute mitigé quant aux résultats : la proportion de femmes dans les conseils des entreprises cotées du CAC 40 et du SBF 120 a triplée entre 2009 et 2015, totalisant respectivement 34 et 32%. S’agissant des entreprises non cotées remplissant les seuils légaux, ces dernières semblent en revanche être bien en deçà des objectifs attendus, avec une proportion de femmes dans leurs conseils estimée à 14,2%. Moins de 5% des conseils d’administration et de surveillance sont dirigés par des femmes et aucune société du CAC 40 n’est dirigée par une femme.

Deux difficultés essentielles sont ciblées par le rapport : une relative méconnaissance des dispositions législatives par les entreprises et, d’autre part, l’absence de contrôle et le peu d’efficacité (et d’application) des sanctions.

2017, l’année de la mixité ?

L’ensemble des dispositions définitives de la loi sont entrées en vigueur au 1er janvier dernier.

Désormais, la proportion des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance de chaque sexe au sein des sociétés cotées ne peut être inférieure à 40% à l’issue de la première assemblée générale ordinaire qui suit le 1er janvier 2017.

Les dispositions s’appliquant aux sociétés anonymes ou en commandites par actions, non cotées, qui pour le troisième exercice consécutif remplissent les seuils (plus de 500 salariés et un total de bilan ou de chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros) sont également entrées en vigueur au 1er janvier 2017.

En l’absence de disposition expresse, les seuils de référence chiffrés ne semblent pas correspondre à des chiffres consolidés, et s’apprécient dès lors par société.

La loi n°2014-873 du 4 août 2014 a précisé que le premier des trois exercices consécutifs s’entend à compter du 1er janvier 2014, rendant ainsi l’obligation effective à compter du 1er janvier 2017.

Cette même loi étend par ailleurs le champ d’application de l’obligation de mixité en abaissant, à compter du 1er janvier 2020, le seuil de 500 salariés à 250 salariés permanents ; étant précisé que pour l’application de ce seuil aux sociétés de 250 à 499 salariés permanents, le décompte des trois exercices consécutifs commence le 1er janvier 2017.

Cette obligation de respecter une proportion de 40% d’administrateurs ou de membres du conseil de surveillance de chaque sexe s’applique, pour les sociétés non cotées, à l’issue de la plus prochaine assemblée qui a vocation à statuer sur des nominations.

Sans compter une difficulté d’interprétation quant à l’obligation de la mise en conformité des conseils

Une ambigüité demeure toutefois quant à la date de mise en conformité de la composition des conseils d’administrations et de surveillance des sociétés non cotées répondant aux seuils : le critère de mixité doit être apprécié à l’issue de la première assemblée générale ordinaire qui suit le 1er janvier 2017, sans distinguer entre les sociétés cotées et celles qui ne le sont pas.

Se pose alors la question de l’articulation de ce constat, avec, dans les sociétés non cotées répondant aux seuils, la mise en œuvre effective de la mixité.

Dans sa communication n°16-029 du Comité juridique du 7 septembre 2016, l’Association nationale des sociétés par actions (ANSA) estime que le calendrier spécifique instauré par la loi de 2011 impose que l’objectif soit atteint pour l’ensemble des sociétés concernées à l’issue de la première assemblée réunie en 2017, de sorte que la composition du conseil serait alors appréciée que cette assemblée ait ou non à statuer sur des nominations.

Cette interprétation nous semble toutefois contestable : les termes de la loi (articles L. 225-18-1, L. 225-69-1 et L. 226-4-1 du Code de commerce) ont en effet différé pour les sociétés non cotées l’effectivité de la mesure à la prochaine assemblée appelée à statuer sur des nominations. Partant de ce constat, l’assemblée générale appelée à se tenir au cours de l’année 2017 pourra soit (i) vérifier sa composition et en cas de nominations inscrites à l’ordre du jour, se prononcer sur lesdites nominations en respectant la proportion de 40%, soit (ii) si ces nominations ne sont pas inscrites à l’ordre du jour de l’assemblée, constater que le critère de mixité n’est pas rempli et qu’il devra l’être à l’issue de la prochaine assemblée ayant à statuer sur des nominations.

Précisions sur la détermination du nombre d’administrateurs ou de membres du conseil de surveillance

S’agissant de la détermination du nombre d’administrateurs ou de membres du conseil de surveillance, rappelons seulement que depuis le 1er janvier 2017, le représentant permanent d’une personne morale administrateur ou membre du conseil de surveillance est pris en compte pour apprécier la conformité de la composition du conseil (articles L. 225-20 et L. 225-76 du Code de commerce). Les administrateurs ou membres du conseil de surveillance élus par les salariés ne sont en revanche pas pris en compte pour l’appréciation de la proportion des administrateurs de chaque sexe (articles L. 225-27 et L. 225-79 du Code de commerce).

Auteurs

Charles-Yves Rivière, avocat associé, Corporate/Fusions & acquisitions, CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon

Cécile Prouillet, avocat, Corporate/Fusions & acquisitions, CMS Bureau Francis Lefebvre Lyon

Féminisation des organes de direction des sociétés : quelles nouvelles obligations en 2017 ? – Article paru dans La Tribune / Acteurs de l’économie le 16 janvier 2017
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