Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image
Scroll to top

Haut

La limite territoriale d’une clause de non-concurrence

La limite territoriale d’une clause de non-concurrence

Doit-on considérer que la clause de non-concurrence stipulée dans un contrat d’agence commerciale est valable lorsqu’elle interdit à l’agent de s’intéresser, directement ou indirectement, à des activités visées par le mandat dans les villes où il se sera déplacé pour des missions au cours de l’exécution du mandat ?


La règle spéciale en matière de contrat d’agence commerciale énonce que le contrat peut contenir une clause de non-concurrence après la cessation du contrat. Cette clause doit être établie par écrit et concerner le secteur géographique et, le cas échéant, le groupe de personnes confié à l’agent commercial ainsi que le type de biens ou services pour lesquels il exerce la représentation interne du contrat (article L.134-14 du Code de commerce).

En l’occurrence, l’activité en cause était l’achat de métaux précieux, de bijoux et de pièces de monnaie et, pour déclarer nulle la clause de non-concurrence, la Cour d’appel avait relevé que :

  • les conditions tenant à la limitation de la portée géographique de la clause n’étaient pas respectées. En effet, puisque le périmètre géographique de la clause de non-concurrence n’était ni circonscrit, ni déterminable au moment de la conclusion du contrat, mais appelait au contraire à s’étendre sans aucune limite à tout le territoire français au fur et à mesure de l’exécution du mandat ;
  • cette clause n’avait pas pour but de protéger la clientèle du mandant. En l’espèce, l’objet du mandat consistait en la réalisation de transactions ponctuelles, non ou peu renouvelables, auprès de la population nationale adulte indifférenciée, ce qui excluait toute fidélisation, notion inhérente au conseil de clientèle ou d’achalandage qui suppose une application géographique, inexistante en l’espèce ;
  • la clause n’avait pour objectif que d’interdire l’accès au marché national à l’agent en le privant de la possibilité de continuer à exercer cette activité.

Pour sa défense, au visa de l’article 1134 du Code civil (devenu article 1103) et du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, le mandant soulignait que la clause de non-concurrence était justifiée par ses intérêts légitimes et ne portait pas une atteinte excessive à la liberté d’exercice de la profession de l’agent. Il faisait valoir sa notoriété auprès de la clientèle, un savoir-faire spécifique, une autre activité exercée par l’agent et le fait que la clause n’emportait concrètement interdiction de poursuivre l’activité visée par le mandat que dans environ 70 villes parmi les 36 000 communes du territoire national.

La Cour de cassation a cependant rejeté le pourvoi (Cass. com., 11 mai 2017, n° 15-12.872) et a jugé que la Cour d’appel avait légalement justifié sa décision en appliquant les principes de droit commun dégagés pour apprécier les critères de validité d’une clause de non-concurrence, à savoir la limitation dans le temps et dans l’espace, mais aussi une juste proportion par rapport à l’objet du contrat et la protection des intérêts légitimes de son bénéficiaire.

S’il n’est pas étonnant que les conditions de validité d’une clause de non-concurrence dégagées par le droit commun des contrats interfèrent sur l’appréciation de la validité d’une clause de non-concurrence régie par un droit spécial, le rejet de la proportionnalité de la clause est pour le moins surprenant et inquiétant en ce qu’il a été justifié par le fait que la clientèle du mandant ne pouvait pas être fidélisée, puisque l’activité consistait en la réalisation de transactions ponctuelles, selon le juge, peu ou non renouvelables, auprès de la population nationale adulte indifférenciée !

 

Auteur

Brigitte Gauclère, avocat counsel, droit commercial, droit de la distribution et immobilier

Print Friendly, PDF & Email