Actions gratuites : le choc de complexification
17 janvier 2017
Sur le régime des actions gratuites (AGA), on pouvait croire que le législateur était dorénavant convaincu tant de l’opportunité d’associer les salariés aux fruits de l’entreprise au sein de laquelle ils exercent leur activité que de la nécessité de préserver une certaine stabilité fiscale et sociale en matière d’actionnariat salarial. Las ! La loi de finances pour 2017 vient d’introduire une troisième révision en cinq ans du régime social et fiscal des AGA.
En substance, le bénéfice du régime fiscal et social défini par la loi dite Macron en matière d’AGA (voir article du 31 août 2015) est partiellement remis en cause et ce, pour les seules actions attribuées en application d’une autorisation votée en assemblée générale postérieurement au 30 décembre 2016.
Pour les futurs attributaires de telles AGA, le bénéfice de l’abattement pour durée de détention (si les actions ont été conservées au moins deux ans à compter de leur date d’acquisition définitive) au titre du gain d’acquisition (qui correspond à l’avantage salarial c’est-à-dire, sauf exception, à la valeur de l’action à la date à laquelle elle est définitivement acquise par le bénéficiaire) sera plafonné à la fraction de ce gain inférieure à 300.000 euros par an. Le même plafond s’applique pour déterminer l’exigibilité de la contribution sociale salariale de 10% (qui avait été supprimée dans le cadre de la loi Macron, et qui renaît donc de ses cendres lorsque le gain d’acquisition excède 300.000 euros par an).
Pour la société attributrice enfin, le taux de la contribution sociale patronale est relevé à 30%, mais continue de s’appliquer à la valeur des seules actions effectivement acquises par les bénéficiaires (l’exonération de cette contribution étant maintenue pour les PME n’ayant pas distribué de dividendes au cours des cinq dernières années étant maintenue).
En revanche, les AGAs attribuées en application d’une autorisation donnée en assemblée générale consentie jusqu’au 30 décembre 2016 continuent de bénéficier du régime favorable issu de la Loi Macron, indépendamment de la date à laquelle les titres seront effectivement acquis ou cédés.
Les sociétés disposant encore d’une autorisation d’attribution d’AGA donnée par leurs associés antérieurement au 31 décembre 2016 pourront donc opportunément l’utiliser pour bénéficier du précédent régime, issu de la loi Macron. Pour l’avenir, le nouveau régime imposera de tenir compte des effets de seuil qu’il induit, ce qui ajoutera une touche de complexité. A cet égard, les sociétés attributrices pourraient être tentées de se tourner vers des plans avec une durée d’acquisition réduite, voire d’opter pour des attributions gratuites d’actions de préférence, dont les caractéristiques peuvent justifier une valorisation moins élevée que les actions ordinaires.
En tout état de cause ces évolutions vont singulièrement renforcer la complexité du traitement social et fiscal des AGA – lequel différera non plus seulement en raison de leur date mais également de leur montant – et ce, dans l’attente d’un éventuel nouveau changement l’année prochaine ?…
Auteurs
Pierre Bonneau, avocat associé en droit social
Jean-Charles Benois, avocat counsel en droit fiscal.
Actions gratuites : le choc de complexification – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 9 janvier 2017
Related Posts
Sous-capitalisation et abus de droit : prémices d’une relation contrariée... 16 juillet 2015 | CMS FL
Attributions d’actions gratuites : la contribution patronale est due même... 3 juillet 2014 | CMS FL
Rupture conventionnelle et transaction : une délicate combinaison... 5 juillet 2013 | CMS FL
L’importance du code de conduite dans la mise en place d’un dispositif antic... 18 juin 2018 | CMS FL
Information des salariés sur les opérations de cession : les retouches de la l... 27 octobre 2015 | CMS FL
De nouvelles évolutions pour les retraites chapeau... 26 décembre 2016 | CMS FL
Définition de la prépondérance immobilière : de Charybde en Scylla... 18 novembre 2015 | CMS FL
La clause dite de conscience : outil de sécurisation des dirigeants d’entrepr... 30 décembre 2024 | Pascaline Neymond
Articles récents
- L’évaluation des salariés : un pouvoir patronal reposant sur des méthodes objectives
- L’Accord de Performance Collective (APC) : un outil juridique puissant, soumis à contrôle judiciaire de réalité
- La difficile contestation du caractère professionnel de l’accident déclaré en situation de télétravail
- La Cour de cassation consacre le droit des télétravailleurs aux titres-restaurant au nom du principe d’égalité de traitement
- DRH de Start-up : comment réussir ses premières élections professionnelles ?
- Annulation en justice du PSE homologué : le Conseil d’Etat précise les règles de révision du PSE unilatéral !
- Le droit de se taire n’a pas à être notifié au salarié
- Procédure disciplinaire et licenciement : le Conseil constitutionnel tranche sur le droit de se taire
- Intelligence artificielle : le forçage de la consultation du CSE
- Les arrêts du 10 septembre 2025 sur les congés payés ou le syndrome du juge légiférant
