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La loi de finances pour 2015 et la seconde loi de finances rectificative pour 2014 : mesures intéressant les entreprises

La loi de finances pour 2015 et la seconde loi de finances rectificative pour 2014 : mesures intéressant les entreprises

La loi de finances pour 2015 (LF) et la seconde loi de finances rectificative pour 2014 (LFR) ont été publiées au JO du 30 décembre. Voici une sélection des mesures intéressant les entreprises.

Régime des sociétés mères (art. 72 LFR)

Le régime des sociétés mères subit deux modifications (une autre a été déclarée inconstitutionnelle, celle qui prévoyait d’exclure de ce régime favorable les dividendes qui ont été prélevés sur des bénéfices non soumis à l’IS):

  • La première consiste à exclure du régime les produits distribués par une société «dans la proportion où les bénéfices ainsi distribués sont déductibles du résultat imposable de cette société». L’objectif de cette exclusion (qui constitue la transposition de la directive 2014/86/UE du 8 juillet 2014) est de prévenir les situations de double exonération due à un conflit de qualifications fiscales entre Etats. Certains produits financiers hybrides pouvant être qualifiés de titres de capital dans l’Etat de la société mère et de titres de dette dans l’Etat de la filiale, le cumul de la déduction dans ce dernier et de l’exonération dans le premier est ainsi neutralisé. Les nouvelles dispositions s‘appliquent aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2015.
  • La seconde consiste à garantir le maintien du régime des sociétés mères lorsque les titres de la filiale sont transférés à une fiducie (régie par les articles 2011 et suivants du Code civil). Il est désormais prévu que le transfert des titres dans un patrimoine fiduciaire laisse subsister l’applicabilité du régime des sociétés mères sans interruption du délai de conservation de deux ans, à certaines conditions. Une règle procédant du même esprit est également introduite dans le dispositif de l’intégration fiscale.

Rachat par les sociétés de leurs propres de titres (art. 88 LFR)

La loi prévoit que les gains réalisés à compter de 2015 par les associés ou actionnaires au titre du rachat de leurs parts ou actions seront imposables selon le seul régime des plus-values, quel que soit le rachat. Pour les associés ou actionnaires, l’enjeu sera en principe différent pour les particuliers et pour les sociétés relevant de l’IS :

  • pour les particuliers, dès lors qu’ils détiennent leurs titres depuis au moins 2 ans, l’imposition comme plus-value est toujours préférable à l’imposition comme dividende car l’IR est calculé après un abattement pour durée de détention au moins égal à 50% (pour les dividendes, il est calculé après une réfaction de seulement 40%),
  • pour les sociétés relevant de l’IS qui détiennent une participation supérieure à 5% du capital de la filiale, le régime des plus-values à long terme susceptible de s’appliquer à leur cession n’est exonérée qu’en contrepartie de la réintégration au résultat imposable au taux normal d’une quote-part de frais et charges de 12% (les dividendes et les distributions assimilées sont exonérés en application du régime des sociétés mères en contrepartie d’une réintégration de seulement 5%).

Les gains de rachat étant désormais qualifiés de plus-values, les sociétés ne pourront pas être soumises à la contribution additionnelle de 3% (alors qu’elles peuvent y être soumises à raison des distributions et remboursements autres que les rachats), et elles n’auront pas non plus à acquitter la retenue à la source pour les répartitions aux actionnaires ou associés non-résidents.

Intégration fiscale horizontale (art. 63 LFR 2014)

La modification consiste à donner l’opportunité nouvelle de créer, pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2014, un groupe d’intégration composé de sociétés sœurs détenues par une même entité européenne (intégration fiscale dite «horizontale» par opposition à l’intégration «verticale», seule prévue jusqu’alors). Seules les sociétés sœurs établies et assujetties à l’IS en France pourront consolider fiscalement leurs résultats, sans que soient pris en compte les résultats des sociétés étrangères (leur société mère et les éventuelles sociétés intermédiaires).

Parmi les conditions devant être remplies, la société mère étrangère et les sociétés étrangères via lesquelles est éventuellement assurée la détention à 95% des sociétés sœurs françaises doivent être assujetties à un impôt équivalent à l’IS français et être établies dans un autre Etat de l’UE, en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein. Ces sociétés doivent aussi ouvrir et clore leurs résultats aux mêmes dates que les sociétés françaises intégrées. La société tête de groupe sera choisie parmi les sociétés sœurs françaises et assurera le rôle de «société mère» au sens de l’intégration. Comme dans le régime de l’intégration «verticale», les groupes pourront comprendre ou non les filiales françaises détenues directement ou indirectement à 95% par les sociétés membres du groupe.

Les retraitements, obligations déclaratives, règles de paiement de l’impôt, réintégrations des charges financières «amendement Charasse», solutions particulières en cas de passage d’un groupe à un autre sont adaptées mais restent calquées sur le modèle de celles qui existent actuellement en cas d’intégration verticale «classique».

Prix de transfert (art. 78 LF et 79 LFR)

Deux mesures relatives aux prix de transfert sont à signaler :

  • Le renforcement des sanctions encourues en cas de non-respect des obligations documentaires : l’article 1735 ter du CGI prévoit désormais que la sanction peut atteindre, compte tenu de la gravité des manquements, le plus élevé des deux montants suivants : 1°) 0,5% du montant des transactions concernées par les documents ou compléments qui n’ont pas été mis à disposition de l’administration après mise en demeure ; 2°) 5% des rectifications du résultat fondées sur l’article 57 du même code et afférentes aux transactions ci-dessus. Cette règle est applicable aux contrôles pour lesquels un avis de vérification est adressé à compter du 1er janvier 2015.
  • L’institution d’une procédure de «régularisation» permettant d’échapper à la retenue à la source sur les revenus réputés distribués à la suite d’une proposition de rectification en matière de prix de transfert. Ainsi, les bénéfices transférés, au sens de l’article 57 du code général des impôts, ou les produits mentionnés à l’article 238 A du même code et qualifiés de revenus distribués peuvent, sur demande écrite du redevable, ne pas être soumis à la retenue à la source si les conditions cumulatives suivantes sont satisfaites : 1°) La demande du redevable de la retenue à la source intervient avant la mise en recouvrement des rappels de retenue à la source ; 2°) Le redevable accepte, dans sa demande, les rehaussements et pénalités afférentes qui ont fait l’objet de la qualification de revenus distribués ; 3°) Les sommes qualifiées de revenus distribués par l’administration sont rapatriées au profit du redevable, sous soixante jours à compter de la demande ; 4°) Le bénéficiaire des sommes qualifiées de revenus distribués n’est pas situé dans un Etat ou un territoire non coopératif.

Evaluations foncières irrégulières (art. 32 LFR)

La jurisprudence a rappelé que les locaux de référence ayant fait l’objet d’une démolition ou d’une restructuration lourde ne peuvent pas servir utilement pour établir des valeurs foncières servant d’assiette aux impôts locaux, CFE ou taxe foncière (en dernier lieu CE du 5 février 2014 n°367995).

Comme nous l’avions indiqué dans l’édition du 24 novembre, le Gouvernement a constaté que les irrégularités touchent entre 1,5 et 2 millions de locaux commerciaux sur un total de 2,8 (soit jusqu’à 71% d’irrégularités). La loi a légalisé les évaluations foncières reposant sur ces locaux types irréguliers pour faire échec à la jurisprudence. En principe, les valeurs foncières reposant sur ces locaux types ne peuvent donc plus être contestées, y compris pour les contestations pendantes devant les juridictions. On peut toutefois s’interroger sur la constitutionnalité de cette mesure de validation rétroactive, les parlementaires n’ayant pas saisi le Conseil constitutionnel sur ce point.

Droit de communication de l’administration fiscale auprès des commerçants (art. 21 LFR)

Les entreprises commerciales ont l’obligation, sous peine d’amende, de communiquer à l’administration, sur sa demande, les livres, registres et rapports dont la tenue est rendue obligatoire par le Code de Commerce, ainsi que les livres et documents annexes ayant une corrélation certaine avec les données de la comptabilité commerciale.

La LFR élargit considérablement cette obligation pour les droits de communication exercés à compter du 1er janvier 2015.

Le droit de communication s’appliquera à l’égard non plus seulement des livres, registres et rapports, (et documents annexes) mais aussi de tous les documents relatifs à l’activité de l’entreprise. L’administration pourra formuler ses demandes par voie électronique et le droit de communication pourra porter sur des informations relatives à des personnes non identifiées (dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat pris après avis de la CNIL). Il ne s’exercera plus seulement pour l’établissement et le contrôle de l’impôt, mais désormais aussi pour son recouvrement.

Enfin, la sanction est renforcée. Le refus de communication des documents et renseignements demandés par l’administration ou tout comportement faisant obstacle à la communication entraînerait l’application d’une amende de 5.000 € par demande, dès lors que tout ou partie des documents ou renseignement sollicités ne sont pas communiqués.

On peut regretter que la notion de «documents relatifs à l’activité» délimitant le champ des documents qui seront désormais susceptibles de faire l’objet du droit de communication ne soit pas mieux définie, et qu’aucun délai ne soit fixé pour répondre aux demandes. On remarquera également qu’aucun plafonnement des pénalités n’est prévu alors qu’aucune limite n’est fixée au nombre de demandes pouvant être formulées par l’administration.

Cession de titres de sociétés à prépondérance immobilière (art. 55 LFR)

Depuis 2012, les droits d’enregistrement étaient calculés sur une assiette dérogatoire en cas de cession des titres d’une société à prépondérance immobilière (réintégration de certaines dettes). Pour tenir compte des difficultés d’application, la loi renonce à cette règle spécifique pour les cessions réalisées à compter du 31 décembre 2014.

TVA

Les mesures les plus saillantes concernent :

  • la TVA à l’importation qui pourra, sur option, être autoliquidée sur la déclaration de TVA par les entreprises titulaires d’une procédure de domiciliation unique (PDU) (art. 52 LFR),
  • et plusieurs mesures relatives à la lutte contre la fraude visant les entreprises nouvelles, la vente des véhicules d’occasion et l’évaluation de la fraude et des moyens d’y faire face de manière plus efficace.

 

Auteur

Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale.

 

Article paru dans le magazine Option Finance le 12 janvier 2015
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