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La jurisprudence sur la rédaction des PV des élections : suite … et fin ?

La jurisprudence sur la rédaction des PV des élections : suite … et fin ?

La rédaction du procès-verbal (PV) des élections, qui comporte toutes les observations relatives aux éventuels incidents survenus lors des opérations électorales, est l’avant-dernière étape d’un long processus, avant la proclamation des résultats. Le PV faisant foi de la validité des élections -jusqu’à preuve du contraire-, il faut donc y prêter la plus grande attention.


Qui rédige le PV des élections ?

En l’absence de dispositions spécifiques dans le Code du travail sur le rédacteur du PV, la solution est recherchée dans les principes généraux du droit électoral et le Code électoral.
S’agissant de la rédaction du PV des élections, l’article R.67 du Code électoral prévoit notamment que «le procès-verbal des opérations électorales est rédigé par le secrétaire dans la salle de vote».

Or, pour les élections professionnelles, il n’y a généralement pas de secrétaire au sein des bureaux de vote.

On rappellera en effet qu’il est établi, depuis un arrêt de la Cour de cassation du 16 octobre 2013, qu’à défaut de dispositions spécifiques prévues par le protocole préélectoral, le bureau de vote doit être composé des deux salariés électeurs les plus âgés et du salarié électeur le plus jeune. Cette composition du bureau de vote, qui ne comporte pas de secrétaire, diffère ainsi de celle prévue par le Code électoral puisque, dans le cadre des élections politiques, «le bureau de vote est composé d’un président, d’au moins deux assesseurs et d’un secrétaire choisi par eux parmi les électeurs de la commune».

Dans ce contexte et pour pallier l’absence de secrétaire, la Cour de cassation a admis, dans un arrêt du 2 juillet 2014, qu’en matière d’élections professionnelles, le PV doit être établi par l’un des membres du bureau de vote ou par l’un des électeurs présents choisi par lui.

En adoptant une telle position, la Cour de cassation a fait preuve d’un certain réalisme et a adapté le Code électoral aux spécificités de l’entreprise. Elle consacre également le fait que la rédaction du PV des élections par le secrétaire n’est pas un principe général du droit électoral.

Cette démarche doit être approuvée car l’organisation des élections dans l’entreprise a pris une importance considérable depuis l’entrée en vigueur de la loi du 20 août 2008. En raison des enjeux de la mesure de la représentativité, les élections sont devenues un moment essentiel de la vie sociale de l’entreprise. Pour l’employeur, c’est un véritable casse-tête compte tenu de l’évolution permanente de la jurisprudence qui a multiplié les règles encadrant l’ensemble du processus électoral. Une certaine souplesse est donc bienvenue et il faut souhaiter que la Cour de cassation continue à écarter -chaque fois que les spécificités de l’entreprise l’exigent- les règles du Code électoral, qui ne sauraient être confondues avec les principes généraux du droit électoral.

La saga jurisprudentielle sur la mention des heures d’ouverture et de clôture du scrutin devrait enfin prendre fin avec la modification du formulaire CERFA

Un arrêt du 28 mars 2010 de la Cour de cassation avait créé une véritable onde de choc :
«l’absence de mention des heures d’ouverture et de clôture du scrutin contrairement aux prescriptions de l’article R. 57 du Code électoral est de nature à affecter la sincérité des opérations électorales et, s’agissant des principes généraux du droit électoral, constitue une irrégularité justifiant à elle seule l’annulation des élections». La solution était confirmée par un arrêt du 16 octobre 2013, qui interdisait en outre toute régularisation postérieure du PV.

De nombreuses entreprises se sont laissées prendre au piège. Rien n’était d’ailleurs fait pour les aider à l’éviter dans la mesure où le formulaire CERFA proposé par le ministère du Travail ne comportait pas de rubrique spécifique pour indiquer les heures d’ouverture et de clôture du scrutin. Les candidats malheureux avaient beau jeu de se prévaloir de cette irrégularité pour obtenir, sur la base de ce seul motif, l’annulation des élections.

Renonçant au formalisme pour le formalisme, la Cour de cassation a finalement admis que les heures d’ouverture et de clôture peuvent figurer sur un document annexé au PV des élections (Cass. Soc. 17 décembre 2014). Elle a également jugé qu’un constat d’huissier peut suppléer l’absence de mention dans le PV (Cass. Soc. 28 janvier 2015).

Fort opportunément, la Cour a fini par faire prévaloir l’esprit de la règle et non sa lettre. Le principe général du droit électoral qui doit être respecté, c’est la sincérité du scrutin, celle-ci pouvant être établie par tout moyen et non par la seule mention des heures d’ouverture et de fermeture du scrutin sur le PV des élections.

La question ne devrait cependant plus se poser à l’avenir car le formulaire CERFA a enfin été modifié et comporte désormais une rubrique permettant de mentionner les heures d’ouverture et de clôture du scrutin.

 

Auteur

Ludovique Clavreul, avocat en droit social.

 

*La jurisprudence sur la rédaction des PV des élections : suite … et fin ?* – Article paru dans Les Echos Business le 6 avril 2015
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