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Prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine contraires au droit de l’Union européenne

Prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine contraires au droit de l’Union européenne

Alors que la vague de réclamations en matière de prélèvement sociaux français appliqués aux revenus fonciers et plus-values immobilières des non-résidents se poursuit, relayée par la presse, la CJUE vient de rendre un arrêt attendu et qui viendra alimenter le débat actuel (arrêt du 26/02/2015, aff.C-623/13, de Ruyter).

Une question préjudicielle a en effet été posée à la CJUE par le Conseil d’Etat sur la pertinence de l’application de prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine des personnes affiliées à un système de sécurité sociale dans un autre Etat à la lumière du règlement n°408/71 visant à la coordination des législations nationales en matière de sécurité sociale et ce, afin d’assurer la libre circulation des travailleurs au sein de l’UE.

Le contribuable était domicilié en France mais soumis à la sécurité sociale aux Pays-Bas où il exerçait son activité professionnelle. Assujetti en France aux prélèvements sociaux sur ses revenus du patrimoine, il a invoqué le règlement n°1408/71 afin de contester ces derniers.

La CJUE considère qu’il existe un lien direct et pertinent entre les prélèvements en cause et la législation de sécurité sociale française. Les prélèvements sociaux grevant les revenus du patrimoine des résidents de France (et, selon la nature des revenus, des non-résidents) viennent en effet financer le système français de sécurité sociale. Dès lors, le principe d’unicité de législation de sécurité sociale applicable au sein de l’UE et prévu par le règlement n°1408/71 s’applique à ces prélèvements. La règle de conflit posée par le règlement étant absolue (sauf exception expresse), l’application de celui-ci ne se limite pas aux revenus tirés d’une activité professionnelle. Il en résulte qu’un contribuable cotisant à raison de ses revenus professionnels dans un Etat ne peut être également soumis à des prélèvements finançant la sécurité sociale d’un autre Etat sur ses revenus du patrimoine.

La CJUE apporte à cet égard plusieurs précisions intéressantes. L’application du règlement n°1408/71 n’est pas subordonnée à l’exercice d’une activité professionnelle. En outre, l’existence de contrepartie en termes de prestations est dépourvue de pertinence aux fins d’application du règlement. Enfin, l’impossibilité pour la France de soumettre les revenus patrimoniaux du salarié aux cotisations sociales n’est pas remise en cause par le fait que les Pays-Bas n’aient pas encore assujetti ces revenus aux cotisations sociales.

L’arrêt précité donnera à la Commission européenne une base solide dans le cadre de la procédure en infraction d’ores et déjà initiée contre la France afin de contester l’application des prélèvements sociaux français aux non-résidents (Procédure EU Pilot 2013/4168). Le Gouvernement français devra en tirer les conséquences pour le futur.

Pour le passé, les contribuables devront procéder par voie de réclamation.

La solution de la CJUE renforce à cet égard tant la position des contribuables se trouvant dans la même situation que le contribuable visé par l’arrêt que plus généralement celle des contribuables soumis, en application du règlement communautaire ou en vertu d’un accord en matière de sécurité sociale, à un système de sécurité sociale étranger.

 

Auteurs

Pierre-Jean Douvier, avocat associé, département fiscalité internationale.

Xenia Lordkipanidzé, avocat, département fiscalité internationale.

 

*Prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine contraires au droit de l’Union européenne* – L’actualité fiscale en bref parue dans le magazine Option Finance le 9 mars 2015

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