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Du soin qu’il faut apporter à la mise en place d’une direction post-LBO

Un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 23 mai 2013 invite à la plus grande prudence lors de la mise en place des organes de direction dans le cadre d’une opération de LBO.

Plusieurs sociétés avaient acquis au moyen d’un LBO les actions d’une SAS en maintenant à ses fonctions le Président qui était en place. Un comité de surveillance avait été institué avec pour mission de conseiller le Président et de le surveiller. Ce comité réunissait les investisseurs. Un pacte d’actionnaires conférait par ailleurs, selon ses propres termes, la main mise aux investisseurs sur la direction de la société et donc sur leurs investissements tout en laissant, en apparence seulement, les pouvoirs à son Président.

On sait que dans les montages de LBO, il est classique de voir des rapports direction-investisseurs organisés sur un modèle plus ou moins voisin. « Cette organisation répond à la logique de l’opération de LBO qui repose sur une surveillance resserrée de l’équipe dirigeante par l’investisseur financier et l’instauration d’opportunités d’échange et de collaboration entre eux. Ces clauses ne doivent toutefois pas porter atteinte à la répartition des pouvoirs fixés par la loi entre les différents organes sociaux » (LBO, Ed. Francis Lefebvre, 2e éd., 2013, p. 32, n°62). C’est bien cette dernière affirmation qui est mise à l’épreuve ici.

Ainsi, aux termes de ce pacte, les décisions concernant le groupe nouvellement formé, devaient « avoir obtenu l’accord préalable du comité de surveillance avant d’être mises en œuvre ». Il en allait de même des conventions réglementées ainsi que des opérations ou engagements d’un montant supérieur à 15 000 €.

À la suite de difficultés financières, est venue l’heure des comptes. Le Président, révoqué de ses fonctions, a mis en cause la responsabilité civile des membres du conseil de surveillance.

La cour d’appel de Paris a estimé que la responsabilité des investisseurs pouvait, sur le principe, être retenue au motif que ceux-ci s’étaient comportés comme de véritables dirigeants. Pour cause, il a été relevé que les investisseurs voulaient conserver un contrôle étroit et que le dirigeant opérationnel n’avait pas le pouvoir en dernier ressort et n’exerçait ainsi pas ses fonctions en toute indépendance à l’inverse des membres du comité dont les décisions étaient souveraines.

Les investisseurs étaient a priori protégés par le caractère d’organe de surveillance du conseil dont ils étaient membres. Il est néanmoins saisissant de remarquer qu’en raison de leur volonté de se réserver le pouvoir décisionnel dans la société cible, ceux-ci ont été considérés par les juges comme de véritables dirigeants. Les conséquences sont loin d’être négligeables. Notamment, dans l’hypothèse où, comme en l’espèce, le LBO serait en difficulté, leur responsabilité civile pourrait être recherchée pour faute de gestion. La qualification de dirigeant de fait entraîne donc, entre autres, cette conséquence drastique d’exposer les investisseurs au risque d’une action en comblement de passif dans l’hypothèse où le LBO tournerait mal.

En définitive, et l’arrêt rapporté l’illustre, il est essentiel d’accorder le plus grand soin à la mise en place du système de gouvernance post-LBO de la société cible. Si une mission de surveillance est confiée aux investisseurs, il convient au minimum d’éviter que celle-ci ne prive d’indépendance dans l’exercice de leurs fonctions les dirigeants de la société cible.

 

A propos de l’auteur

Christophe Blondeau, avocat associé. Il traite plus spécifiquement des opérations transactionnelles de fusions – acquisitions, de joint-venture et de private equity. Il couvre l’ensemble des questions relatives aux opérations transactionnelles notamment dans le secteur immobilier.

 

Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 4 novembre 2013

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