Image Image Image Image Image Image Image Image Image Image
Scroll to top

Haut

La loi de finances pour 2019 comporte de nombreuses mesures intéressant les entreprises : point sur les plus importantes

La loi de finances pour 2019 comporte de nombreuses mesures intéressant les entreprises : point sur les plus importantes

La loi de finances pour 2019 (loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018) comporte de nombreuses mesures, dont seules certaines présentent un intérêt majeur. La plupart entrent en vigueur pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.


Déduction des charges financières (art. 34)

En vue d’assurer la transposition de la directive dite ATAD 2016/1164 du 12 juillet 2016 « établissant des règles pour lutter contre les pratiques d’évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur » concernant la déductibilité des charges financières, plusieurs modifications sont apportées.

Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, un nouveau dispositif introduit à l’article 212 bis du CGI plafonnera la déduction fiscale des charges financières nettes au plus élevé des deux montants suivants : 3 millions d’euros ou 30% d’un résultat avant impôts retraité dit « EBITDA fiscal » (par exception, les sociétés sous-capitalisées-dont les dettes vis-à-vis d’entreprises liées dépassent une fois et demie les fonds propres- sont soumises à un plafonnement spécifique applicable dès lors que leurs charges financières nettes dépassant 1 million d’euros ou 10% de l’EBITDA).

Ce nouveau dispositif remplace les dispositifs du « rabot fiscal » (qui prévoyait de réintégrer au résultat imposable 25% des charges financières nettes lorsqu’elles atteignaient au moins 3 millions d’euros), et de sous-capitalisation (qui figurait aux II et III de l’article 212 du CGI).

Est également abrogée la mesure qui figurait au IX de l’article 209 du CGI (« l’amendement Carrez ») qui limitait spécifiquement la déduction des charges financières afférentes à l’acquisition de titres de participation.

A ce dispositif (au lieu des trois précédents) s’ajoutent :

  • les dispositifs relatifs au taux d’intérêt plafond, en fonction des taux pratiqués par les établissements de crédit, rémunérant les sommes laissées ou mises à disposition par une entreprise liée (CGI, art. 212, I-a) ou par un autre associé (CGI, art. 39, 1-3°),
  • le dispositif « anti-hybride » prévoyant la non-déductibilité des intérêts versés aux sociétés liées lorsque l’entreprise créancière est faiblement imposée ou exonérée sur les produits correspondants (CGI, art. 212, I-b), et
  • l’amendement « Charasse » (CGI, art. 223 B al. 6) qui vise à lutter contre les achats à soi-même réalisés dans le cadre de l’intégration fiscale.

Sans rentrer dans les détails du nouveau dispositif, notons qu’il comporte une définition très large des charges financières visées et qu’il prévoit en principe une non-déductibilité au-delà du plafond (les charges financières non déduites pouvant être reportées, comme -sous conditions- la capacité de déduction inemployée au titre d’un exercice). Notons enfin que les entreprises appartenant à un groupe consolidé peuvent, sous condition, déduire 75% des charges financières dépassant le plafond au titre de l’exercice.

Règles anti-abus (art. 36, 108 et 109)

Issue de la directive dite ATAD, une nouvelle règle anti-abus générale est rendue applicable pour l’établissement de l’IS, pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.

Selon ce texte « il n’est pas tenu compte d’un montage ou d’une série de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d’objectif principal ou au titre d’un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité du droit fiscal applicable, ne sont pas authentiques compte tenu de l’ensemble des faits et circonstances pertinents », c’est-à-dire n’ont pas été « mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique ».

Cette définition en matière d’IS converge substantiellement avec celle qui préexistait en matière de régime des sociétés mères. Le texte s’applique « sous réserve de celles prévues au III de l’article 210-0 A », à savoir les règles relatives à l’abus du régime de faveur des fusions et opérations assimilées, qui restent ainsi pleinement applicables.

Un « mini-abus de droit » est également institué à l’article L 64 A du LPF, qui reprend une définition semblable à celle de l’abus de droit « classique » à ceci près que l’administration n’aura qu’à démontrer que les actes accomplis ont pour « motif principal » d’éluder ou d’atténuer l’impôt (au lieu d’un objectif exclusivement fiscal). Même si cette nouvelle clause ne s’appliquera qu’à compter de 2021 pour les actes passés à compter de 2020, elle inquiète beaucoup les professionnels. En matière d’IS on peut toutefois penser que l’administration cherchera la plupart du temps à appliquer la règle anti-abus générale pour l’IS.

Signalons enfin que loi prend le contre-pied de certains schémas d’arbitrage des dividendes, qui permettaient d’échapper à la retenue à la source sur les dividendes de source française devant être versés à un non-résident (ils étaient, pour cela, remis à un résident français se substituant temporairement à l’actionnaire non-résident).

Intégration fiscale (article 32)

Par une décision « Steria » de 2015 la CJUE a condamné le système d’intégration français qui réservait aux seules sociétés membres d’un groupe d’intégration la neutralisation de la quote-part des frais et charges (QPFC) sur dividendes, alors que cette neutralisation aurait dû être admise sur les dividendes reçus d’une filiale européenne détenue dans des conditions identiques à une filiale française qui aurait pu faire partie d’un groupe intégré. Depuis, le régime de l’intégration a été modifié mais des incertitudes subsistaient.

La loi de finances a, en conséquence, adopté un certain nombre de mesures pour rendre le système français plus conforme au droit de l’Union européenne, mesures applicables aux exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.

Par ailleurs, d’autres modifications, applicables aux exercices clos à compter du 31 décembre 2018, ont été adoptées pour tenir compte des conséquences du Brexit pour les groupes français.
Nous vous renvoyons, pour un examen détaillé de ces mesures, à l’article de Sophie Mahy et Pauline Biaggi paru au numéro du 7 janvier 2019 d’option finance.

Brevets (art. 37)

La loi revoit substantiellement le régime d’imposition des produits de la propriété industrielle en vue de se conformer aux recommandations formulées par l’OCDE dans le cadre de l’action 5 du plan BEPS (ainsi qu’à la pression exercée par l’Union européenne).

Ce régime se caractérise par l’application au résultat net bénéficiaire de la cession ou de la concession de certains actifs de propriété intellectuelle d’un taux réduit de 10%, en contrepartie du respect d’un certain nombre de conditions.

La soumission au taux réduit s’opère en soustrayant du résultat soumis au taux normal le résultat net bénéficiaire afférent aux actifs de propriété industrielle énumérés par le texte. Ce résultat net spécifique fait alors l’objet d’une imposition séparée au taux de 10%.

Le nouveau dispositif s’applique (sauf exceptions) aux résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019.

Il vise les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés et les personnes physiques. Nous vous renvoyons à l’article d’Eva Aubry paru le 10 décembre 2018 dans Option Finance.

Dernier acompte des grandes entreprises (art. 39)

Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, l’entreprise devra avoir versé pour la date du dernier acompte (pour le 15 décembre 2019 s’agissant des entreprises dont l’exercice est calé sur l’année civile) au moins :

  • 95% de l’IS estimé dû au titre de l’exercice lorsque le chiffre d’affaires de l’entreprise (ou la somme des chiffres d’affaires des sociétés membres d’un groupe) du dernier exercice clos ou de la période d’imposition, ramené s’il y a lieu à douze mois, est compris entre 250 millions d’euros et 1 milliard d’euros,
  • 98% de l’IS estimé pour celles qui ont réalisé un chiffre d’affaires dépassant 1 milliard d’euros.

Révocabilité pendant 5 ans de l’option pour l’IS exercée par les sociétés de personnes (art. 50)

L’option pour l’IS exercée par les sociétés de personnes présentait jusqu’à présent un caractère irrévocable. La loi introduit un droit à renonciation, qui est toutefois limité dans le temps : désormais, les sociétés de personnes et groupements assimilés (ainsi que les EIRL) pourront renoncer à leur option jusqu’à la fin du mois précédant la date limite de versement du premier acompte d’IS du cinquième exercice suivant celui au titre duquel l’option a été exercée.

Suramortissement (art. 25, 55, 56 et 70)

La loi proroge, en le modifiant, le dispositif de « suramortissement fiscal » des poids lourds utilisant des énergies « propres » (CGI, art. 39 decies A). Elle introduit par ailleurs trois nouveaux dispositifs de suramortissement fiscal en faveur :

  • des investissements réalisés par les PME industrielles dans la robotique et le numérique (CGI, art. 39 decies B nouveau) ;
  • des investissements réalisés par les armateurs pour la transition énergétique de leurs navires et bateaux (CGI, art. 39 decies C nouveau) ;
  • des investissements dans les équipements de réfrigération et de traitement de l’air sans fluides hydrofluorocarbonés (CGI, art. 39 decies D nouveau).

Crédit d’impôt recherche (art. 150 et 151)

La loi étend l’obligation de souscription de l’état annexe n°2069-A-1-SD, décrivant les recherches financées par le crédit d’impôt recherche (CIR), à toutes les entreprises qui engagent plus de 2 M€ de dépenses de recherche. Ce seuil était jusqu’à présent fixé à 100 M€.

Droits d’enregistrement (art. 26)

La loi prévoit la gratuité de l’enregistrement de nombreux actes relatifs à la vie des sociétés. Cette mesure s’applique aux actes enregistrés à compter du 1er janvier 2019, ou des déclarations déposées à compter du 1er janvier 2019.

Divers

Enfin, notons parmi de nombreuses mesures diverses, que :

  • la définition des établissements industriels pour les besoins des impôts locaux est inscrite dans la loi,
  • la loi transpose la directive TVA sur les bons,
  • les vendeurs d’immeubles entrant dans la dispositif Pinel doivent, depuis le début 2019, inscrire des informations relatives aux frais et commissions des intermédiaires, dans les actes d’acquisition et les actes authentiques d’acquisition,
  • une nouvelle déclaration est prévue pour les entreprises qui exposent des dépenses de mécénat,
  • l’article 210 B du CGI est modifié (par un 1 bis nouveau) pour prévoir qu’en cas d’apport partiel d’actif d’éléments assimilés à une branche complète d’activité, « la société apporteuse est réputée détenir les titres remis en contrepartie de l’apport depuis à la date à laquelle celle-ci a acquis les titres apportés »,
  • les règles de retenue à la source sur les rémunérations versées aux non-résidents seront modifiées à compter du 1er janvier 2020.
Auteurs

Emmanuelle Féna-Lagueny, avocat counsel en matière d’impôts directs au sein du département de doctrine fiscale

Florent Ruault, avocat, spécialiste des impôts directs au sein du département de doctrine fiscale

 

La loi de finances pour 2019 comporte de nombreuses mesures int̩ressant les entreprises : point sur les plus importantes РArticle paru dans le magazine Option Finance le 21 janvier 2019
Print Friendly, PDF & Email