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Procédure de clémence : nécessité d’apporter une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments déjà en possession de la Commission

Commission Européenne

Dans le cadre de l’affaire du cartel du bitume de pénétration routier en Espagne sanctionné en 2007 par la Commission européenne, les sociétés BP et Repsol avaient obtenu, au titre du programme de clémence, une immunité totale d’amende pour la première, qui avait révélé l’entente, et une réduction d’amende de 40 % pour la seconde, en raison de sa coopération à l’enquête.

Repsol avait contesté le montant de l’amende qui lui avait été infligée en invoquant une mauvaise interprétation et application par la Commission de la notion de « faits précédemment ignorés » au sens de la communication de la Commission sur la clémence de 2002 (« Communication »), selon laquelle « si une entreprise fournit des éléments de preuve de faits précédemment ignorés de la Commission qui ont une incidence directe sur la gravité ou la durée de l’entente présumée, la Commission ne tiendra pas compte de ces faits pour fixer le montant de l’amende infligée à l’entreprise qui les a fournis ». Plus précisément, Repsol estimait avoir été la première à attirer l’attention de la Commission sur la période de commission de l’infraction (élément cognitif). Selon elle, peu importait que cet élément ait déjà été fourni par BP, dès lors qu’au moment où elle avait fait sa demande d’immunité partielle, la Commission ne semblait pas être consciente de la poursuite des activités du cartel pendant la période litigieuse. En conséquence, elle aurait dû bénéficier d’une immunité totale d’amende pour cette période.

La Cour de justice rejette l’argument fondé sur l’exigence d’un critère cognitif : la Communication sur la clémence doit être interprétée en ce sens qu’un élément de preuve fourni par une entreprise dans le cadre de sa demande de clémence ne peut être considéré comme un élément de preuve de « faits précédemment ignorés par la Commission » que s’il présente objectivement une valeur ajoutée significative par rapport aux éléments déjà en possession de la Commission. A cet égard, il y a lieu de considérer que la possession par la Commission d’un élément de preuve équivaut à la connaissance de son contenu, indépendamment du point de savoir si cet élément a été effectivement examiné et analysé par ses services.

Peu importe donc que la Commission ait effectivement pris connaissance d’un élément pour que celui-ci soit exclu de la catégorie des faits précédemment ignorés, il suffit qu’il ait déjà été en sa possession lorsqu’il lui est à nouveau communiqué.

CJUE, 9 juin 2016, aff. C-617/13 P (cartel du bitume routier espagnol)

Auteur

Elisabeth Flaicher-Maneval, avocat Counsel au sein du département de doctrine juridique, CMS Bureau Francis Lefebvre Paris