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Contrôle fiscal informatisé : Plus que trois mois pour vous mettre en conformité

L’arrêté du 29 juillet 2013 a défini les normes informatiques des fichiers des écritures comptables dont la remise est obligatoire pour les contrôles engagés à partir du 1er janvier 2014. Il ne reste que peu de temps aux entreprises pour mettre œuvre des actions adaptées afin de se conformer à ces nouvelles exigences fiscales dont le non-respect peut être lourdement sanctionné.

 

L’article 14 de la loi de finances rectificative pour 2012 a modifié l’article L 47 A I du livre des procédures fiscales en vue de rendre obligatoire, pour l’ensemble des entreprises tenant une comptabilité informatisée, la présentation des documents comptables sous forme dématérialisée.

Cette nouvelle mesure modifie en profondeur le régime de la présentation des documents comptables. En effet, la simple faculté prévue par les dispositions actuellement en vigueur jusqu’au 1er janvier 2014 est transformée en une obligation pour les contrôles fiscaux engagés à partir du 1er janvier 2014. En outre, ce nouveau dispositif s’applique à l’ensemble des entreprises soumises par le code général des impôts à une obligation de présentation des documents comptables.

Le nouvel article L 47 A I du LPF qui s’applique aux vérifications de comptabilité pour lesquelles l’avis de vérification est adressé après le 1er janvier 2014 implique que les fichiers des écritures comptables concernés par l’obligation de remise portent sur les exercices soumis au délai de reprise de l’administration fiscale, c’est-à-dire à des exercices antérieurs à la loi. En outre, le nouveau texte prévoit que la remise des fichiers devra être effectuée au début des opérations de contrôle afin de permettre au vérificateur d’effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s’assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. L’administration devra détruire, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis.

L’arrêté du 29 juillet 2013 a défini les normes informatiques que doivent respecter les copies de fichiers des écritures comptables. Afin de guider les entreprises dans la constitution de ces fichiers, l’administration fiscale a publié sur son site http://www.impots.gouv.fr une notice destinée à expliciter les nouvelles exigences. Les entreprises disposent de peu de temps pour mettre en place des actions adaptées pour se conformer à ces nouvelles exigences dont le non-respect peut être lourdement sanctionné.

I. Les normes informatiques à respecter

L’article A 47 A 1 du LPF modifié par l’arrêté du 29 juillet 2013 définit le format et le contenu des fichiers des écritures comptables devant être remis.

L’ensemble des données comptables et des écritures retracées dans tous les journaux comptables au titre d’un exercice devront ainsi être remis dans un fichier unique. Afin de gérer la volumétrie, le fichier pourra, sous réserve de l’obtention de l’accord préalable du service vérificateur, être scindé en plusieurs parties qu’il conviendra de remettre simultanément.

Il importe de veiller à ce que le fichier des écritures comptables comprenne l’ensemble des écritures comptables natives (non agrégées)(1) enregistrées au cours de l’exercice. Il est à noter que le vérificateur pourra dans certains cas limitativement énumérés à l’article A 47 A 1 XIV du LPF demander une remise en deux temps ce qui implique la conservation et la constitution de deux fichiers : un premier fichier avec les écritures centralisées et un deuxième avec les écritures «natives».

Il conviendra de vérifier que les écritures d’enregistrement du bilan d’ouverture ainsi que les écritures d’inventaire sont correctement intégrées et qu’ont été exclues les écritures de solde des comptes de charges et de produits. Au sein du fichier, les écritures devront être numérotées chronologiquement de manière croissante, sans rupture ni inversion dans la séquence. En outre, pour chaque écriture comptable, l’arrêté définit 18 champs obligatoires (21 ou 22 champs pour les comptabilités de trésorerie) tels que le code journal, le numéro de l’écriture ou bien le numéro de compte dont les 3 premiers caractères doivent correspondre à des chiffres respectant les normes du plan comptable français. Ce dernier point exclut donc la possibilité d’utiliser un plan groupe différant du Plan Comptable Général français.

Le respect de ces nouvelles normes informatiques est obligatoire pour les contrôles des exercices clos à compter du 1er janvier 2013. L’application de ces nouvelles normes reste facultative pour les exercices antérieurs. L’administration fiscale semble toutefois indiquer que les fichiers portant sur ces exercices restent soumis aux anciennes dispositions de l’article A 47 A 1 du LPF et doivent contenir à minima les informations permettant de reconstituer les documents comptables obligatoires.

II. Les actions à entreprendre

Il convient de rappeler que le défaut de présentation de la comptabilité selon les modalités du nouvel article L47 A I du LPF emporte l’application d’une amende lourde. Cette amende codifiée dans un nouvel article 1729 D du CGI s’élève :

  • en l’absence de rehaussement, à 5‰ du chiffre d’affaires déclaré par exercice soumis à contrôle ou à 5‰ du montant des recettes brutes déclaré par année soumise à contrôle ;
  • en cas de rehaussement, à 5‰ du chiffre d’affaires rehaussé par exercice soumis à contrôle ou à 5‰ du montant des recettes brutes rehaussé par année soumise à contrôle
  • à 1500 € lorsque le montant de l’amende mentionnée ci-dessus est inférieur à cette somme.

Il est à noter que le législateur n’a pas précisé si cette sanction s’applique uniquement dans le cas de refus de remise des fichiers historiques des écritures comptables ou peut être également encourue en cas de non-respect des normes techniques ou à raison du caractère incomplet des données. Il appartiendra au juge d’apprécier, au cas par cas, l’opportunité d’appliquer cette amende en fonction de la gravité des manquements constatés.

Enfin, le régime de l’opposition à contrôle fiscal prévu à l’article L74 du LPF est étendu au défaut de présentation des documents comptables sous forme dématérialisée. Par suite, l’opposition à la transmission du fichier des écritures comptables sera sanctionnée par l’évaluation d’office des bases d’imposition de l’entreprise concernée. Dans ce cas, la majoration de 100% sur les droits rappelés, prévue à l’article 1732 du CGI, pourra être appliquée en sus de l’amende prévue par le nouvel article 1729 D du CGI.

D’expérience, il s’avère efficace de travailler en mode projet en constituant une équipe pluridisciplinaire comprenant à la fois des comptables, des fiscalistes, des informaticiens qui devront travailler en interconnexion afin d’identifier et localiser les données comptables natives (non agrégées) à intégrer dans les fichiers.

Un travail d’inventaire et de ciblage de l’information est donc nécessaire notamment lorsque les données sont disséminées dans différentes applications. Lors de cette étape, l’équipe en charge du projet pourra au besoin faire appel aux équipes métiers afin de la guider/la conforter dans ses choix et garantir ainsi la piste d’audit. Il est important de veiller dès le début de la mise en place du projet que les objectifs et enjeux poursuivis soient clairement définis. Il en est de même du délai imparti qui devra inclure la réalisation de tests et si besoin la réalisation de développements particuliers devant permettre la construction des fichiers.

En outre, une réflexion devra être menée quant à la pérennisation de la constitution des fichiers au titre des exercices à venir ainsi que sur l’adaptation des applications informatiques impliquées.

A cet égard, il convient de garder à l’esprit que l’administration fiscale semble vouloir étendre ces nouvelles obligations aux établissements stables français de sociétés étrangères ainsi qu’aux établissements stables étrangers de sociétés françaises ce qui implique des travaux et des coûts d’adaptation importants.

Enfin, la conduite et la réussite de ce projet aura sans nulle doute une incidence sur la mission de certification des Commissaires aux comptes et leur évaluation du contrôle interne. En particulier, l’amélioration de la piste d’audit devrait influencer positivement leur évaluation des risques résultant de traitements informatisés et faciliter la mise en œuvre de leurs normes d’exercice professionnel.

La conformité des outils informatiques aux exigences comptables et fiscales est dorénavant placée au cœur des préoccupations.


1. Ecritures comptables d’origine, non centralisées

 

 

A propos des auteurs

Caroline Moroni-Seror, avocat spécialiste des questions de fiscalité informatique. Elle intervient dans les missions liées à la prévention et l’assistance de contrôles fiscaux informatisés ainsi qu’en matière de facturation et plus particulièrement de dématérialisation fiscale de factures.

Frédéric Chalvignac, Expert-comptable Associé de Fidelio

 

Article paru dans la revue Option Finance du 7 octobre 2013

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