De la communication dans l’e-banking

15 mai 2017
La digitalisation de notre économie pousse parfois les banques à vouloir concentrer la communication avec leurs clients dans l’espace virtuel qu’elles créent pour ces derniers, notamment au moyen de boîtes mail dédiées et sécurisées. On s’interroge parfois sur l’opposabilité au client de cette forme de communication, puisque la prise de connaissance implique une démarche active du client (le log in).
Dans une récente affaire, un tribunal autrichien demandait à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de dire si un e-mail adressé par une banque dans la boîte mail dédiée, mise à disposition par la banque et consultable après connexion au site Internet de la banque, était « fournie » au client sur un support durable ou seulement « mise à disposition ».
Cette question tient à l’existence d’un double régime de communication, institué par le législateur européen, qui distingue entre les informations devant être « fournies » au client de celles qui peuvent n’être que « mises à disposition » (directive 2007/64 du 13 novembre 2007, aujourd’hui remplacée par la directive 2015/2366 du 25 novembre 2015). Très pratiquement, la mise à disposition implique un rôle actif du client, qui doit se connecter à son espace dédié pour consulter ses relevés de compte, alors que la fourniture implique un rôle plus passif du client qui reçoit alors les relevés sans avoir à se connecter.
La Cour considère que lorsque la banque se limite à mettre à disposition les amendements contractuels, l’information n’est pas fournie au client ; elle est seulement rendue accessible (CJUE, 25 janvier 2017, C-375/15). Elle rejoint ainsi la position de l’avocat général qui avait considéré qu’une boîte mail de la banque en ligne est assimilable à un coffre personnel situé dans les locaux de la banque : en l’absence de toute notification ou de message d’alerte, les informations placées dans cette boîte destinées au client ne peuvent pas être considérées comme ayant été « fournies » au client.
Ce faisant, la CJUE retient une interprétation légèrement plus libérale que dans sa précédente décision du 5 juillet 2012 (CJUE, 5 juillet 2012, C-49/11) –essentielle sur la qualification de support durable d’un site Internet– où elle avait jugé que les informations dues au consommateur n’étaient ni reçues ni fournies lorsqu’elles étaient rendues accessibles par un lien hypertexte.
Dans le contexte mouvant de la transposition de la nouvelle directive européenne sur les services de paiement, cette décision invite les banques opérant dans l’e-banking à bien distinguer les informations devant être fournies de celles pouvant n’être que mises à disposition et, lorsqu’elles doivent les fournir, à doubler leur mise à disposition par voie électronique d’un envoi d’e-mail vers la boîte mail privée de leurs clients.
Auteurs
Thomas Livenais, avocat en droit de la propriété intellectuelle
Alexandre Marion, avocat spécialisé en droit bancaire et financier
A lire également
Conciliation du droit à l’information par le biais du registre des sociétés... 18 août 2017 | CMS FL

Effet unitaire de la marque de l’Union européenne et coexistence pacifique... 17 novembre 2017 | CMS FL

Le printemps de la digitalisation des services financiers... 17 avril 2018 | CMS FL

Rachat de LinkedIn par Microsoft : la Commission publie sa décision... 23 mai 2017 | CMS FL

De la difficulté d’obtenir réparation des commentaires négatifs postés... 27 avril 2016 | CMS FL

Interdiction du traçage des internautes non-membres de Facebook en Belgique. Qu... 22 février 2016 | CMS FL

Les parlementaires mobilisés autour des nouvelles technologies... 23 mai 2017 | CMS FL

Le règlement général sur la protection des données s’enrichit de nouve... 12 juin 2017 | CMS FL

Articles récents
- La semaine de quatre jours ou comment flexibiliser l’organisation du travail dans le respect des contraintes juridiques
- Dialogue social dans le secteur des VTC : l’accord fixant le revenu minimum net par course est homologué
- Détachement de travailleurs : modification de la déclaration préalable et de l’attestation de détachement
- Directives sur des conditions de travail transparentes et prévisibles et sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée : la loi de transposition est publiée !
- Eoliennes en mer : les impacts en droit social de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables
- Défaut d’information-consultation du CSE sur les conséquences environnementales d’un projet de restructuration d’entreprise : premières décisions des juges du fond
- Le droit du travail adapté au droit de l’Union européenne
- Accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur : quelles sont les principales dispositions ?
- Accord de performance collective : fermeture de site et modalités de négociation dérogatoire
- Forfait jours : attention à l’autonomie du salarié