Protection des courriers électroniques provenant de la messagerie personnelle du salarié

14 juin 2016
Lors d’un contentieux prud’homal, un employeur avait produit aux débats un échange de courriels reçus par une salariée sur sa boîte de messagerie personnelle et émanant d’adresses privées non professionnelles. Selon l’employeur, une telle pièce était recevable en raison du fait que la salariée consultait sa messagerie personnelle depuis l’ordinateur professionnel mis à sa disposition.
Saisie de ces faits, la Chambre sociale de la Cour de cassation a considéré, dans un arrêt du 26 janvier 2016, que les « messages électroniques [provenant] de la messagerie personnelle de la salariée distincte de la messagerie professionnelle dont celle-ci disposait pour les besoins de son activité […] devaient être écartés des débats en ce que leur production en justice portait atteinte au secret des correspondances » (Cass. soc., 26 janvier 2016, n° 14-15.360).
Cet arrêt s’inscrit dans la ligne jurisprudentielle désormais bien établie relative à l’accès aux fichiers et courriels des salariés sur le lieu de travail. Dans un arrêt Nikon de 2001, la Cour de cassation a en effet consacré le droit du salarié « même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée » (Cass. soc., 2 octobre 2001, n°99-42.942).
Cependant, la Cour de cassation a progressivement érigé une véritable présomption de caractère professionnel aux courriels adressés ou reçus par le salarié sur son ordinateur professionnel. Il en résulte que l’employeur peut librement les contrôler (Cass. soc., 26 juin 2012, n°11-15.310). En revanche, s’ils ont été identifiés comme étant personnels, l’employeur peut les ouvrir uniquement en présence de l’intéressé ou celui-ci dûment appelé (Cass. soc., 15 décembre 2010, n°08-42.486 ; Cass. soc., 16 mai 2013, n°12-11.866).
Par cet arrêt du 26 janvier 2016, la Cour de cassation affine sa jurisprudence et fait prévaloir la nature privée des informations quel que soit l’outil utilisé : les courriels provenant d’une messagerie personnelle sont à l’abri de l’employeur et ce, même s’ils sont accueillis sur un ordinateur professionnel.
Auteur
Caroline Froger-Michon, avocat en matière de droit social
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