Retraite et prévoyance : les apports de la circulaire ACOSS du 4 février 2014
22 avril 2014
Après la Direction de la Sécurité sociale fin 2013, l’ACOSS est à son tour venue interpréter, dans une circulaire «questions/réponses», les dispositions du décret du 9 janvier 2012. Une partie de ces positions devrait être reprise dans un nouveau décret.
Par 31 questions/réponses, l’ACOSS entend «clarifier» les conditions du caractère collectif et obligatoire des régimes de protection sociale complémentaire, dont notamment les critères permettant de former une catégorie objective, les dispenses d’adhésion de certaines catégories de salariés et la modulation de la contribution patronale. Ces précisions sont censées répondre aux questions soulevées par les entreprises suite à la circulaire DSS du 25 septembre 2013.
L’appartenance aux catégories de cadres et de non cadres (critère n°1)
Selon l’ACOSS, il est possible de se référer aux définitions données par la convention AGIRC pour définir une catégorie, quand bien même certains salariés ne seraient pas affiliés à l’AGIRC en application de ces définitions. A titre d’exemple, tous les agents de maîtrise répondant à la définition de l’article 36 de la convention AGIRC peuvent constituer une catégorie, même si ces agents de maîtrise ne sont pas affiliés à l’AGIRC.
Précisions concernant les catégories définies en fonction des tranches de rémunération (critère n°2)
Si l’on souhaite déterminer une catégorie par rapport aux tranches de rémunération, l’ACOSS indique qu’il doit être tenu compte de l’ensemble des éléments soumis à cotisations sociales. Il ne peut donc être considéré que seule la part fixe du salaire (hors part variable) serait prise en compte. Toutefois, elle admet que si l’acte juridique, mettant en place le régime, le prévoit, l’employeur peut retenir comme base de référence le salaire de l’année N-1. Il est précisé que dans ce cas, il convient cependant de prévoir des aménagements pour les salariés dont le contrat de travail serait modifié en cours d’année (par exemple en cas de passage à temps partiel, ou de passage à temps plein, par le biais d’une règle de proratisation).
Elle précise également que quand une catégorie est définie en fonction de ce critère, il ne peut être prévu que (ou montants) différents de contribution patronale.
Le critère de l’appartenance aux catégories et classifications professionnelles est le 1er niveau de la classification mais uniquement si celui-ci correspond à une fonction (critère n°3)
Ce critère correspond au premier niveau de subdivision de l’article de la convention sur la classification des emplois mais à condition, ajoute l’ACOSS, que celui-ci corresponde à des fonctions. Ceci est un changement majeur par rapport à la circulaire DSS de septembre 2013. Plusieurs exemples sont donnés comme notamment celui de la Convention collective nationale des sociétés d’assurance : l’article définissant la classification stipule que celle-ci s’effectue en sept classes numérotées de 1 à 7. La classe d’appartenance de chaque salarié ne correspondant pas à des fonctions identifiées mais à une pondération de plusieurs critères, celle-ci ne peut être considérée comme le premier niveau de classification.
Le décret modificatif à paraître devrait reprendre la référence aux «premier niveau des catégories ou classifications professionnelles», mais à ce jour, l’exigence de fonctions identifiées n’est pas expressément mentionnée dans le projet de texte.
Il est également précisé que lorsque deux conventions collectives distinctes sont applicables aux cadres et aux non-cadres, il convient de faire masse des deux textes et de raisonner de manière globale pour apprécier quel est le premier niveau de classification professionnel. Ainsi, dans ce cas, le plus fréquemment le premier niveau de classification sera «cadre» et «non cadres».
La catégorie des cadres supérieurs «hors classification», c’est-à-dire ceux que la convention collective désigne comme occupant des fonctions supérieures à la position la plus élevée définie par la classification, ne peut en principe être retenue.
Justification des différences de traitement pour les catégories non présumées collectives
L’ACOSS donne des exemples de cas où les différences de garanties accordées à une catégorie non présumée collective (à savoir principalement les sous-catégories prévues par les conventions collectives, correspondant au critère 4 du décret) pourront être considérées comme justifiées.
Pour les garanties de retraite supplémentaire, l’existence d‘un niveau moyen de rémunération distinct par rapport aux autres salariés pourrait justifier une différence de traitement.
L’ACOSS indique toutefois que les différences de traitement ainsi opérées devront être suffisamment proportionnées au regard des écarts moyens de rémunération entre cette catégorie et les autres salariés.
Ainsi, par exemple, selon l’ACOSS, le fait de réserver un dispositif de retraite supplémentaire aux seuls échelons supérieurs d’une catégorie de cadres (lorsqu’il s’agit bien d’une subdivision correspondant au critère n°4) devrait être généralement admis.
Interdiction des délais de carence en matière de frais de santé
L’ACOSS condamne les délais de carence dans les régimes frais de santé (pour certaines garanties, en principe optique et dentaire, les droits à remboursements ne sont ouverts que quelques mois après l’adhésion).
La dispense d’adhésion prévue à l’article 11 de la loi EVIN possible uniquement dans deux cas
L’article 11 de la loi « Evin » du 31 décembre 1989 prévoit qu’aucun salarié employé dans une entreprise avant la mise en place, à la suite d’une décision unilatérale de l’employeur, d’un régime collectif frais de santé ou prévoyance ne peut être contraint à cotiser contre son gré à ce système. La question se pose de longue date de savoir si en cas de modification significative des garanties ou prestations, il faut considérer qu’un nouveau régime est mis en place, et en conséquence laisser la possibilité aux salariés présents à cette date de ne pas y cotiser. Ce point n’a pas été tranché à ce jour par la jurisprudence. En revanche, depuis une circulaire du 25 septembre 2013, la Direction de la sécurité sociale a pris position sur ce sujet et l’ACOSS confirme cette solution : la dispense d’adhésion n’est ouverte que lors de l’institution du régime ou bien lorsque le régime initial était entièrement à la charge de l’employeur, et que celui-ci est modifié pour mettre à la charge du salarié une fraction de la cotisation.
Les dispenses d’adhésion pour les salariés en CDD, à temps partiel et les apprentis autorisées dans les décisions unilatérales
Le décret du 9 janvier 2012 avait supprimé la possibilité de prévoir des dispenses d’adhésion pour les CDD, apprentis et salariés à temps partiel dans une décision unilatérale. La circulaire DSS du 23 septembre avait toutefois annoncé qu’un décret modificatif pris pour l’application de la loi du 14 juin 2013 de sécurisation de l’emploi devrait réintroduire cette possibilité. L’ACOSS précise que ces dispenses peuvent d’ores et déjà figurer dans les décisions unilatérales sans attendre le décret modificatif. Si cette position devrait être suivie par une grande majorité des URSSAF, seule la parution du décret permettra de sécuriser complétement les entreprises sur ce point.
A propos de l’auteur
Florence Duprat-Cerri, avocat. Elle intervient en matière d’assistance rapprochée d’entreprises dans la gestion quotidienne des problématiques de protection sociale, la défense devant les juridictions de sociétés clientes en matière de contentieux relatif à la retraite ou la prévoyance et de redressement de cotisations de sécurité sociale, la formations en matière de protection sociale complémentaire et l’épargne salariale.
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