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Un bon extincteur pour le cautionnement : l’apport partiel d’actif

La Cour de cassation vient de rendre un arrêt important en matière de garantie des financements bancaires (arrêt du 19 février 2013). Important mais sollicitant un raisonnement relativement complexe aux confins du droit du cautionnement, des cessions Dailly et des sociétés.

Pour bien saisir l’apport de la décision, il est nécessaire de détailler la chronologie des opérations. En 1993, une société conclut avec une banque une convention-cadre d’escompte prévoyant que tout bordereau de cession de créances professionnelles (bordereau Dailly) qui y fera référence sera soumis aux stipulations de la convention. En 1997,la banque obtient que les engagements de la société à son égard soient garantis par un cautionnement solidaire consenti par une personne physique. La banque apporte son fonds de commerce en 1999 à un autre établissement de crédit, sans doute sous le régime de l’apport partiel d’actif soumis au régime des scissions. L’arrêt n’est pas très clair sur ce point, mais le raisonnement qu’il déroule suppose qu’il en a été ainsi car il postule que l’apport a entraîné transfert des créances de la banque apporteuse à la banque bénéficiaire de l’apport ; ce qui n’est pas le cas d’un simple apport de fonds de commerce (sauf clause spécifique) mais se vérifie en présence d’un apport partiel d’actif en raison de la dévolution universelle de patrimoine qui accompagne l’opration.

En 2008, la société est soumise à une liquidation judiciaire et la banque, bénéficiaire de l’apport partiel d’actif déclare une créance de plus de 400 000 euros au titre d’opération d’escompte intervenues courant 2007. Dans le même temps, la banque créancière assigne la caution en exécution de ses engagements. Pour savoir si la caution devait ou non payer, il fallait déterminer si la créance de la banque était ou non antérieure à l’apport partiel d’actif.

En effet, selon une analyse désormais bien acquise, lorsque la banque créancière a fait l’obet d’une fusion, d’une scission ou a réalisé un apport partiel d’actif l’entité bénéficiaire et donc titulaire de la créance ne peut agir contre la caution que si le fait générateur de la créance est antérieur à la date de l’opération. Dans le contexte de l’arrêt commenté, il s’agissait donc de savoir si la créance déclarée correspondait à des crédits dont le fait générateur devait être situé en 2007 – donc postérieurement à l’apport partiel – ou si elle trouvait son origine dans la convention-cadre d’escompte conclue en 1993, en tant que simple modalité d’excution de celle-ci.

La cour d’appel avait opté pour la seconde analyse, et donc admis que la caution devait payer. Selon les juges du fond, les bordereaux Dailly sur lesquel s’appuyait la déclaration de créance de la banque faisaient expressément référence à la convention-cadre de 1993 ; ils en ont déduit que la naissance des créances cautionnées devait être fixée à cette date, donc être très largement antérieure à celle de l’apport.

L’analyse est censurée par la Cour de cassation. Pour elle, « la caution ne pouvait être tenue au titre de la garantie donnée au profit de la banque [apporteuse] que des créances cédées à cette banque avant l’apport de son fonds de commerce à la banque [bénéficiaire de l’apport] ».

Techniquement,la solution est peu discutable. Si la convention-cadre a pour objet d’organiser les modalités selon lesquelles les opérations d’escompte futures seront réalisées, elle ne constitue par le fait générateur de la créance d’escompte consenti par la banque et garanti par une cession Dailly. Cette créance prendra naissance à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, car c’est à ce moment précis qu’intervient le transfert de propriété des créances Dailly (art. L. 313-27 du Code monétaire et financier) et l’obligation de garantie du cédant (art. L.313-24), donc l’obligation de la caution.

Pour éviter ce résultat, la banque bénéficiaire de l’apport aurait dû demander à la caution de maintenir expressément son engagement à son égard. Ce qui était, peut-être, envisageable sachant qu’en 1999 la situation financière de la société n’était pas encore dégradée.

 

A propos de l’auteur

Arnaud Reygrobellet, of Counsel, Doctrine juridique

 

Analyse juridique parue dans la revue Option Finance du 8 avril 2013

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