De nouvelles évolutions pour les retraites chapeau

26 décembre 2016
Plusieurs évolutions importantes sont à envisager concernant les régimes de retraite à prestations définies (communément appelés « retraites chapeau ») : conditions de performance pour les mandataires sociaux des sociétés cotées, et adaptations lors de la transposition de la directive européenne améliorant l’acquisition et la préservation des droits à pension complémentaire.
Des changements pour les mandataires sociaux des sociétés cotées avec la mise en place de conditions de performance à deux niveaux.
Avant la loi n°2015-990 du 6 août 2015, dite « loi Macron », les retraites chapeau des mandataires sociaux de sociétés cotées étaient de simples conventions réglementées, sans conditions de performance. Avec la loi « Macron », ces régimes de retraite deviennent des conventions « super-réglementées » assorties de conditions de performance à double niveau, répondant au régime suivant :
1) autorisation préalable et fixation obligatoire de conditions de performance par le conseil d’administration ou de surveillance ;
2) publication de ces décisions sur le site Internet de la société ;
3) approbation par l’assemblée générale, objet d’une résolution individuelle par mandataire social concerné ;
4) chaque année : vérification des conditions de performance par le conseil d’administration ou de surveillance pour l’accroissement des droits potentiels, limité à 3% de la rémunération de référence par an ;
5) au moment du départ à la retraite (ou de la cessation d’activité si elle intervient avant) : vérification des conditions de performance par le conseil d’administration ou de surveillance le versement des montants convenus ; et
6) publication de ces décisions sur le site Internet de la société.
Cette procédure est applicable au niveau de la société cotée, pour les retraites chapeau mises en place au niveau de cette société cotée ou de toute société qu’elle contrôle ou qui la contrôle au sens des II (contrôle exclusif direct ou indirect) et III (contrôle conjoint) de l’article L.233-16 du Code de commerce.
S’agissant des régimes de retraite chapeau en cours à la date de la Loi, le régime transitoire de la loi Macron impose une application du mécanisme susvisé à compter des renouvellements de mandats.
La loi Macron s’applique également aux régimes de retraite chapeau dont bénéficient les mandataires sociaux au titre d’un contrat de travail au sein de la société cotée ou de toute société qu’elle contrôle ou qui la contrôle au sens des II et III de l’article L.233-16 du Code de commerce. Le mécanisme susvisé s’applique pour la durée du mandat social, à compter de la nomination ou du renouvellement du mandat.
Aussi, les sociétés ayant des régimes de retraite chapeau en cours et dont certains mandataires sociaux verront leur mandat renouvelé par la prochaine assemblée générale devraient dès à présent préparer la mise en conformité de ces régimes avec la loi « Macron ».
Une évolution à terme du fait de la réglementation européenne.
Des changements importants sont à prévoir dans les années à venir concernant ces régimes compte tenu de la directive 2014/50/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux prescriptions minimales visant à accroître la mobilité des travailleurs entre les États membres en améliorant l’acquisition et la préservation des droits à pension complémentaire.
Les principales contraintes posées par la Directive sont les suivantes :
a) lorsqu’une période d’acquisition, un délai d’attente (condition d’ancienneté) ou les deux sont appliqués, la période cumulée totale n’excède en aucun cas trois ans.
En conséquence, après trois ans d’ancienneté dans l’entreprise, le travailleur doit avoir des droits acquis dans le cadre du régime de retraite ;
b) lorsqu’un âge minimal est fixé pour l’acquisition de droits à pension, celui-ci n’est pas supérieur à 21 ans.
En conséquence, l’acquisition des droits ne peut être subordonnée au fait d’avoir atteint l’âge légal de la retraite, même si le versement des prestations intervient à ce moment.
La difficulté est qu’à ce jour, les régimes de retraite à prestations définies relevant de l’article L 137-11 du Code de la sécurité sociale doivent avoir les caractéristiques suivantes pour bénéficier du régime social de « faveur » prévu par cet article :
- il n’existe aucun droit acquis aux prestations de retraite pour le bénéficiaire potentiel s’il quitte l’entreprise avant la liquidation de sa retraite de base, sauf quelques rares exceptions (décès, licenciement après 55 ans sous réserve de ne reprendre aucune activité professionnelle jusqu’à la retraite, invalidité 2e et 3e catégorie et préretraite) ;
- les droits ne sont pas individualisables pour le bénéficiaire tant qu’il n’a pas rempli cette condition puisque le régime n’est pas à droits acquis.
Ces régimes seront donc amenés à évoluer dans les prochaines années, sachant que les Etats membres doivent en principe transposer cette directive au plus tard le 21 mai 2018.
Auteurs
Florence Duprat-Cerri, avocat counsel en droit social.
Thibault Jabouley, avocat en Corporate et en droit boursier
De nouvelles évolutions pour les retraites chapeau – Article paru dans Les Echos Business le 26 décembre 2016
A lire également
Construction : les principales nouveautés législatives... 4 décembre 2015 | CMS FL

Les apports de la loi « Macron » en matière de droit des propriétés intel... 20 novembre 2015 | CMS FL

La loi pour une République numérique renforce les pouvoirs de l’ARCEP... 12 décembre 2016 | CMS FL

De l’instabilité chronique du régime des actions gratuites... 28 décembre 2016 | CMS FL

Retraites à prestations définies : un coup d’arrêt à la taxation... 30 juillet 2013 | CMS FL
Attributions gratuites d’actions (AGA) : l’embellie n’aura pas duré !... 21 février 2017 | CMS FL

Actions gratuites : le choc de complexification... 17 janvier 2017 | CMS FL

Projet de loi Macron : du droit des concentrations vers un droit de la déconcen... 22 juillet 2015 | CMS FL

Articles récents
- Chômage : tour d’horizon des principales règles applicables au 1er février 2023
- Pas de prise en compte des arrêts maladie dans l’ancienneté pour le calcul de l’indemnité de licenciement
- Inspection du travail : la DGT élabore son nouveau plan d’action pour 2023-2025
- Recruteurs : la CNIL publie un guide afin de se mettre en conformité avec le RGPD
- Conférence : Retraite, chômage, indemnisation des accidents du travail : les nuages s’accumulent en ce début d’année
- Réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles en cas de faute inexcusable : un risque de coût accru pour les employeurs
- Regards croisés sur la procédure du licenciement pour motif économique en France et au Royaume-Uni (Partie 2)
- Réforme des retraites : c’est parti !
- L’agenda électronique du salarié peut être utilisé comme moyen de preuve par l’employeur
- Dialogue social dans le secteur des VTC : signature d’un premier accord sur le revenu minimum net par course