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Réforme de la participation et de l’intéressement par la loi Pacte : la nouveauté est ailleurs

Réforme de la participation et de l’intéressement par la loi Pacte : la nouveauté est ailleurs

La loi Pacte1 réforme les régimes de la participation et de l’intéressement par diverses mesures : refonte des règles de calcul de l’effectif d’assujettissement à la participation, sécurisation des accords, hausse du plafond des primes d’intéressement, etc.

 

La principale incitation au recours à ces dispositifs doit toutefois être cherchée dans la révision de leur régime social, applicable depuis plusieurs mois déjà.

 

La loi réforme la participation…

La loi modifie les règles d’assujettissement à la participation à travers une réforme plus vaste du décompte des seuils d’effectifs.

A ce jour, sont tenues de mettre en place un dispositif de participation les entreprises ayant employé au moins 50 salariés en équivalent temps plein pendant 12 mois consécutifs ou non au cours des trois derniers exercices.

Désormais, le seuil de 50 salariés est apprécié sur une base annuelle et correspond à la moyenne du nombre de personnes employées au cours de chacun des mois de l’année civile.

Surtout, l’assujettissement à la participation n’est effectif que si ce seuil de 50 salariés a été atteint en moyenne chaque année civile pendant cinq années consécutives. La participation est alors mise en œuvre à compter du premier exercice ouvert postérieurement à cette période2.

Le seuil de 50 salariés reste apprécié à l’échelle de l’unité économique et sociale le cas échéant.

En exigeant que l’effectif requis soit atteint pendant cinq ans continus, la loi Pacte restreint le champ des entreprises assujetties à la participation, en contradiction avec l’ambition affichée de promotion de l’épargne salariale.

Sur un autre plan, lorsque la participation est répartie proportionnellement aux salaires, la loi plafonne ceux-ci à trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale et non plus à quatre fois ce plafond : cette mesure conduit à lisser davantage les salaires et favorise les revenus les moins élevés3.

Enfin, les nouveaux accords de participation ne peuvent plus prévoir l’affectation des sommes sur des comptes courants bloqués : seul le placement sur un plan d’épargne est autorisé4

 

…Et amende certaines modalités de calcul de l’intéressement

A ce jour, la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) dispose d’un délai de quatre mois à compter du dépôt d’un accord d’intéressement pour en demander la révision s’il contient des clauses contraires aux dispositions légales.

A défaut d’observations dans ce délai, les exonérations fiscales et sociales attachées à l’intéressement ne peuvent être remises en cause au titre des exercices en cours ou antérieurs à la contestation de l’accord par l’URSSAF ou l’administration fiscale.

La loi Pacte étend la sécurisation découlant de l’absence d’observations de la DIRECCTE à toute la durée de l’accord d’intéressement – soit trois années – et non uniquement à la période passée.

La DIRECCTE dispose cependant de deux mois supplémentaires pour émettre ses observations : celles formulées au cours des quatre premiers mois à compter du dépôt impliquent une révision immédiate de l’accord ; celles formulées au cours des deux mois suivants ne peuvent viser l’exercice en cours – pour lequel les exonérations sont garanties – mais seulement les exercices suivants5.

Par ailleurs, la loi permet de compléter la formule de calcul de l’intéressement :

    • par un objectif pluriannuel, alors que ces objectifs sont appréciés en principe sur une période comprise entre trois mois et un an6 ;
    • par un intéressement de projet, c’est-à-dire un intéressement basé sur un objectif commun à tout ou partie des salariés ; cette forme d’intéressement fondée sur la bonne fin d’un projet donné ne pouvait auparavant être instituée qu’à l’échelle de plusieurs entreprises7.

 

Enfin, le montant de la prime d’intéressement allouée à un bénéficiaire est désormais plafonné aux trois quarts du plafond annuel de la sécurité sociale et non plus à la moitié de ce plafond, et les sommes qui n’ont pu être distribuées en raison des règles de plafonnement individuel peuvent faire l’objet d’une nouvelle répartition immédiate si l’accord le prévoit8.

Ces dispositions nouvelles offrent davantage de liberté dans la définition de la formule de calcul de l’intéressement et sont bienvenues. Il est peu probable toutefois qu’elles concourent à elles seules à accroître fortement le nombre d’accords conclus.

 

Mais la mesure la plus incitative est déjà en vigueur

En réalité, la mesure la plus favorable au développement de la participation et de l’intéressement, qui figurait dans le projet de loi Pacte, a été transposée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 et est déjà applicable.

La participation et l’intéressement sont par principe soumis au forfait social, soit une contribution patronale au taux de 20% (ou à un taux réduit dans certains cas).

Depuis le 1er janvier 2019, sont exonérées de forfait social les sommes versées au titre de la participation par les entreprises qui ont institué un mécanisme de participation volontaire, c’est-à-dire sans y être assujetties – soit les entreprises qui emploient moins de 50 salariés.

Les primes d’intéressement sont quant à elles exonérées de forfait social pour les mêmes entreprises ainsi que pour celles qui emploient au moins 50 salariés et moins de 250 salariés9.

Ainsi, toute somme versée au titre d’un régime de participation volontaire, ou bien au titre de l’intéressement par une entreprise de moins de 250 salariés, est exonérée de forfait social a priori même si cette entreprise est partie à un accord de groupe conclu par des entités qui, ensemble, dépassent les seuils d’effectif en cause (sous réserve de particularités en présence d’une unité économique et sociale).

Plus que les réformes très techniques de la loi Pacte, cette mesure simple incite nettement à la mise en place d’une participation volontaire ou de l’intéressement.

 

1 Loi relative à la croissance et la transformation des entreprises adoptée le 11 avril 2019 soumise à ce jour à l’examen du Conseil Constitutionnel
2 Articles L.3321-1, L.3322-1 et L.3322-2 du Code du travail modifiés. L’entrée en vigueur de ces dispositions est pour l’heure sujette à débat puisque la loi prévoit leur application au 1er janvier 2019 mais renvoie dans le même temps à de nouvelles règles générales de décompte des effectifs qui entreront en vigueur le 1er janvier 2020.
3 Article L.3324-5 du Code du travail modifié
4 Article L.3323-2 du Code du travail modifié
5 Article L.3313-3 du Code du travail modifié
6 Article L.3314-2 du Code du travail modifié
7 Article L.3312-6 du Code du travail modifié
8 Article L.3314-8 modifié et nouvel article L.3314-11 du Code du travail
9 Article L.137-15 du Code de la sécurité sociale

 

Article publié dans Les Echos EXECUTIVES le 6 mai 2019