Crédits d’impôts et participation : l’épilogue
10 avril 2017
Mettant fin à une controverse née d’une position de l’administration fiscale annulée ensuite par le Conseil d’Etat, la Cour de cassation a confirmé dans un arrêt du 10 janvier 20171 l’exclusion des crédits d’impôts du calcul du montant de la réserve spéciale de participation (RSP) des salariés2.
La RSP est calculée à partir du « bénéfice net », soit celui retenu pour être imposé à l’impôt sur les sociétés. La loi étant muette sur le sort des crédits d’impôts (crédit d’impôt recherche, crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, etc.) pour le calcul de ce bénéfice net, l’administration fiscale avait pris une position avantageuse pour les salariés en ce qu’elle préconisait de déduire du bénéfice fiscal « l’impôt sur les sociétés après imputation des crédits d’impôts »3.
Cette solution avait donc mécaniquement pour effet d’augmenter le montant de la RSP.
Cette position, bien qu’annulée par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 20 mars 20134, a servi de
fondement à diverses actions de représentants du personnel tendant à procéder à un nouveau calcul de leur RSP.
L’arrêt de la Cour de cassation du 10 janvier 2017, qui confirme un avis rendu le 14 septembre 20155, par cette même juridiction, apporte sur cette question deux importants enseignements :
- elle relève tout d’abord que sur deux des exercices litigieux, le bénéfice net avait fait l’objet d’une attestation du commissaire aux comptes. Or, dans cette hypothèse et selon l’article L. 3326-1 du Code du travail, le montant du bénéfice net ne peut être remis en cause à l’occasion des litiges nés de l’application des dispositions légales relatives à la participation. Toute demande de réintroduction des crédits d’impôts dans l’assiette de calcul de la RSP est dès lors irrecevable. Il est donc essentiel d’obtenir cette attestation pour éviter tout litige à ce sujet ;
- concernant les autres exercices, la Cour rejoint la solution déjà retenue par le Conseil d’Etat dans l’arrêt précité du 20 mars 2013 : sous le visa de l’article L. 3324-1, elle précise que seul l’impôt sur les sociétés doit être retranché pour le calcul du bénéfice net et ajoute que « dans le cas où une entreprise bénéficie de crédits d’impôts imputables sur le montant de cet impôt, il n’y a pas lieu, par suite, de tenir compte du montant de ces crédits ». La Cour de cassation exclut ainsi tout autre crédit d’impôt dans le calcul du montant de la RSP.
Cette décision respectueuse de la loi devrait donc mettre un terme aux derniers litiges aux forts enjeux financiers qui, pour certaines entreprises, subsistaient encore sur cette épineuse question.
Notes
1 n°14-23 888.
2 Art. L. 3324-1 du Code du travail.
3 Rescrit n°2010/23 du 13 avril 2010.
4 n°347633.
5 n°15006.
Auteur
Pierre Bonneau, avocat associé en droit social
Crédits d’impôts et participation : l’épilogue – Article paru dans La Lettre des Fusions-Acquisitions et du Private Equity, supplément du magazine Option Finance du 27 mars 2017
Related Posts
Directive AIFM : Les nouvelles règles de rémunération au sein des fonds d’i... 4 octobre 2013 | CMS FL
Compliance avec les règles antitrust : se prémunir contre le risque financier ... 11 juillet 2018 | CMS FL
L’immixtion des holdings animatrices de groupe : un débat animé !... 30 juin 2016 | CMS FL
L’amortissement des titres de PME innovantes voit (enfin) le jour !... 27 décembre 2016 | CMS FL
Déduction des retenues à la source : peut mieux faire !... 18 février 2015 | CMS FL
Le sort incertain du licencié dans les procédures collectives... 11 octobre 2018 | CMS FL
Retraites-chapeaux : un contrôle renforcé... 15 octobre 2015 | CMS FL
Infractions routières et véhicule de fonction : la fin de l’impunité... 21 décembre 2016 | CMS FL
Articles récents
- Sécurisation des différences de traitement par accord collectif, un cap à suivre
- L’obligation de vigilance du maître d’ouvrage ne s’étend pas au sous-traitant du cocontractant
- Prestations du CSE : fin du critère d’ancienneté au 31 décembre 2025
- Cession d’une filiale déficitaire : sauf fraude, l’échec du projet de reprise ne permet pas de rechercher la responsabilité de la société mère
- Repos hebdomadaire : la Cour de cassation consacre la semaine civile
- L’inviolabilité du domicile du télétravailleur
- En cas de refus par le salarié inapte d’un poste de reclassement, le médecin du travail doit être à nouveau consulté !
- Le législateur transpose les accords interprofessionnels sur le dialogue social et l’emploi des salariés expérimentés
- Contrats des joueurs esportifs
- Non-respect de la parité entre les femmes et les hommes : pas de remplacement par un suppléant même en cas de démission de l’élu du sexe surreprésenté
