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De la différence entre l’engagement perpétuel et l’engagement à durée indéterminée

De la différence entre l’engagement perpétuel et l’engagement à durée indéterminée

Depuis longtemps, le Code civil édicte un principe d’interdiction des engagements perpétuels pour certains types de contrats spéciaux tels que le louage d’ouvrage (article 1780 alinéa 1er «On ne peut engager ses services qu’à temps, ou pour une entreprise déterminée») ou le bail (article 1818 «le louage de choses est un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer»).

 

L’engagement à durée indéterminée, un engagement qui peut être révoqué unilatéralement

 

Il existe pourtant des contrats à durée indéterminée. C’est même parfois la forme de principe d’un contrat.

 

Ainsi, en droit du travail, en application de l’article L.1221-2 du Code du travail, le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail. Bien qu’à durée indéterminée par principe, il ne constitue pas pour autant un engagement perpétuel.

 

Si le Code du travail, la convention collective et même le contrat de travail peuvent entourer de conditions strictes la rupture de la relation de travail, c’est sous réserve de ne pas rendre impossible la rupture.

 

Ainsi, en application de l’article L.1231-1 du Code du travail, le contrat de travail sans détermination de durée peut cesser à l’initiative d’une des parties contractantes ou d’un commun accord. Cette disposition est directement issue de l’article 1780 du Code civil.

 

Par conséquent, une clause contractuelle ne peut interdire au salarié de démissionner. De la même façon, une clause de garantie d’emploi par l’employeur doit nécessairement être limitée dans le temps.

 

De même, conformément au principe de droit civil, les signataires d’une convention ou d’un accord collectif peuvent toujours mettre un terme aux engagements qu’ils ont contractés dans cette convention ou cet accord.

 

Les tribunaux français ont, pour leur part, régulièrement condamné la perpétuité des conventions mais sans jamais édicter de principe général applicable, sans aucune distinction, à tous les contrats.

 

Par exemple, la jurisprudence a eu l’occasion de réglementer les clauses post-contractuelles de non-concurrence en imposant que la clause soit limitée dans le temps pour être valide.

 

La prohibition générale de l’engagement perpétuel et ses conséquences

 

Il aura fallu attendre la réforme du droit des obligations et l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 pour que ce principe fasse son entrée dans les dispositions du droit commun des contrats du Code civil à l’article 1210 qui dispose désormais «Les engagements perpétuels sont prohibés. Chaque contractant peut y mettre fin dans les conditions prévues pour le contrat à durée déterminée».

 

S’il pouvait exister un doute quant à la sanction des engagements perpétuels avant cette réforme, ce doute n’est plus permis aujourd’hui.

 

Un contrat perpétuel n’est pas nul (à raison d’une contrariété à l’ordre public qui consisterait en une aliénation de la liberté individuelle) mais automatiquement converti en un contrat à durée indéterminée.

 

La conséquence inévitable de cette requalification est que tout contrat perpétuel est résiliable à tout moment par chaque contractant et sans justifier d’un motif légitime, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable.

 

En pratique, cela signifie que les clauses «durée» des contrats doivent faire l’objet d’une réflexion approfondie et ne pas être considérées comme de simples «clauses de style».

 

Pour chaque nouveau contrat à conclure, il est primordial de se poser la question de la pertinence de stipuler une durée déterminée ou indéterminée et de définir avec précision la durée des engagements pris.

 

Il nous semble que pour ne pas être qualifiée de «perpétuelle», cette durée doit être raisonnable au regard notamment de la personne engagée (personne morale ou personne physique) et de la nature du contrat/de l’engagement en question.

 

Caroline Froger-Michon, Avocat associé et Aliénor Fevre, Avocat Counsel, CMS Francis Lefebvre Avocats

 

Article publié dans La lettre des FUSIONS-ACQUISITIONS ET DU PRIVATE EQUITY Supplément du numéro 1699 du 17 avril 2023 2023 – Dossier « La durée des engagements »

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