Détachement de salariés en France : Simplification du SIPSI
11 mai 2023
L’entreprise étrangère qui envisage de détacher un salarié en France doit toujours s’interroger sur les formalités de déclaration préalable. Quand elle est requise, cette déclaration préalable se fait par voie dématérialisée via la plateforme du SIPSI.
Un décret n°2023-185 du 17 mars 2023 relatif au détachement de travailleurs et au conseil d’administration de l’autorité des relations sociales des plateformes d’emploi, allège ces formalités de déclaration préalable.
Une mesure plus que bienvenue!
Opérations soumises et non soumises au SIPSI
L’obligation de déclaration préalable de détachement découle des dispositions des articles L.1262-2-1, I et L.1262-2-2 du Code du travail, permettant à l’administration de s’assurer du respect des conditions de travail des salariés étrangers (européens ou non européens) en France. (Voir notre précédent article sur les règles du SIPSI) (1)
Les opérations soumises à cette obligation de déclaration concernent le détachement pour la réalisation d’une prestation de service internationale, le détachement intra-groupe (articles L.1262-1 alinéas 1 et 2 du Code du travail) et le détachement par une entreprise de travail temporaire (article L.1262-2 du Code du travail).
Pour rappel, la déclaration de détachement ne s’applique pas dans le cadre de détachements pour compte propre (article L.1262-1 alinéa 3 du Code du travail), ni pour les indépendants.
De même, une liste d’activités limitativement fixée par l’arrêté du 4 juin 2019 permet la dispense de déclaration pour des opérations de courte durée.
Cette exemption de déclaration concerne :
-
- les artistes, dans les domaines du spectacle vivant, de la production et diffusion cinématographique et audiovisuelle et de l’édition phonographique, dans la mesure où les interventions des salariés ou la présence sur le territoire national justifiées par l’exécution des prestations ne dépasse pas 90 jours sur douze mois consécutifs ;
-
- les sportifs, les arbitres, membre de l’équipe d’encadrement des sportifs, délégués officiels rattachés à la pratique ou l’organisation dans le cadre de manifestations sportives, dans la mesure où les interventions ou la présence sur le territoire national justifiées par l’exécution des prestations ne dépasse pas 90 jours sur douze mois consécutifs.
Cette dispense s’applique aussi aux «colloques, séminaires et manifestations scientifiques ainsi qu’aux activités d’enseignement dispensées, à titre occasionnel, par des professeurs et chercheurs invités, dans la mesure où les interventions ou la présence sur le territoire national justifiées par l’exécution des prestations ne dépasse pas douze mois consécutifs».
Cependant, est assujettie à ces dispositions l’équipe de montage ou de démontage d’équipements ou d’installations provisoires, de restauration, de transport, de surveillance et de sécurité des sites dédiés aux manifestations.
Cette déclaration ne vaut pas quitus à l’égard de toutes les obligations de l’employeur étranger ou du donneur d’ordre. En effet, la surveillance des conditions du détachement et la production des documents prouvant le respect de la réglementation française doivent être toujours au cœur de l’attention de l’employeur comme du client final français.
Simplification des informations requises sur la plateforme SIPSI
La déclaration préalable de détachement via le téléservice SIPSI instaurée par les articles R.1263-3 et suivants du Code de travail est simplifiée par le décret n°2023-185 du 17 mars 2023.
Au plus tard, à partir du 1er juillet 2023, certaines informations ne seront plus requises, en matière de «prestation» telles que la nature des équipements ou procédés de travail utilisés, les heures de travail ou le nombre de jours de repos des travailleurs détachés.
Les informations relatives aux frais de voyage, de nourriture ainsi que d’hébergement ne seront plus demandées.
Quant à la rubrique «salarié», la date de signature du contrat ne sera plus une information obligatoire.
Enfin, il convient de souligner que la liste des documents que l’entreprise étrangère est tenue de mettre à la disposition de l’inspection du travail sur le lieu de travail en vertu de l’article R.1263-1 du Code du travail va également être allégée. Ainsi, au plus tard au 1er juillet 2023, sont supprimés de cette liste :
-
- tout document attestant du droit applicable au contrat liant l’employeur et le co-contractant établi ou exerçant sur le territoire national ;
-
- et tout document attestant du nombre de contrats exécutés et du montant du chiffre d’affaires réalisé par l’employeur dans son pays d’établissement et sur le territoire national.
La plateforme SIPSI au service de la règlementation du travail
Il convient de rappeler qu’en cas de détachement en France, seul le noyau dur du droit du travail français s’applique aux salariés étrangers.
En revanche, à partir du 13ème mois de détachement en France, c’est l’ensemble des dispositions du Code de travail qui doit s’appliquer, à l’exception des dispositions du Code du travail relatives à la conclusion, à l’exécution, au transfert et à la rupture du contrat de travail.
Via le SIPSI, il sera désormais possible de demander à bénéficier d’une période supplémentaire d’application du seul noyau dur au-delà de 12 mois de détachement, dans la limite de 18 mois (C. trav., art. L.1262-4, II, al.3).
Cette dérogation doit toutefois être préalablement déclarée via SIPSI et motivée.
On le voit, cette simplification des formalités applicables au détachement concerne :
-
- non seulement, en amont, la déclaration préalable au détachement (champ d’application et contenu des informations) ;
-
- mais aussi, en aval, lors de la mise en œuvre du détachement, les documents que l’entreprise étrangère est tenue de conserver sur le lieu de travail et de tenir à disposition des services de l’inspection du travail.
Caroline Froger-Michon, Avocat associé et Haiyan Cai, Juriste, CMS Francis Lefebvre Avocats
A LIRE ÉGALEMENT
(1) Détachement de salariés étrangers en France : attention à la déclaration SIPSI
A lire également
Intégration d’un talent étranger en France : quelles nouveautés?... 24 mai 2019 | CMS FL
Recours à des travailleurs indépendants : attention au risque de requalificati... 28 mai 2019 | CMS FL
Enfants stars des réseaux sociaux : adoption d’une loi protectrice visant... 22 décembre 2020 | Pascaline Neymond
Clause de non-concurrence : le renouvellement doit être exprès... 13 décembre 2022 | Pascaline Neymond
Détachements et sous-traitance : le dumping social sur la sellette... 6 mars 2014 | CMS FL
Conflit en Ukraine : quelles dispositions pour les entreprises ?... 2 juin 2022 | Pascaline Neymond
Le droit à la déconnexion consacré par la Loi Travail... 8 novembre 2016 | CMS FL
Contester la validité de son forfait-jours n’est pas sans risque... 14 avril 2022 | Pascaline Neymond
Articles récents
- Visites médicales : les nouveaux modèles de documents remis au travailleur à l’occasion des visites réalisées par la médecine du travail sont publiés
- Forfait jours : quel contenu pour la convention individuelle de forfait ?
- La Défenseure des droits publie son premier rapport sur la protection des lanceurs d’alerte en France
- Webinaire – La politique des rémunérations
- Attribution gratuite d’actions et calcul des indemnités de rupture
- Retraite anticipée pour inaptitude au travail : la CNAV apporte des précisions sur ce dispositif
- Condition d’ancienneté pour le bénéfice des ASC : une mise en conformité nécessaire pour éviter les redressements Urssaf
- Participation : la Cour de cassation entérine l’impossibilité de remettre en cause le bénéfice fiscal
- Virus mpox ou « variole du singe » : les préconisation du ministère du Travail et de la Santé
- Droit Social + marque une pause estivale