Hamon : stop ou encore ?

2 janvier 2025
Les entreprises dont l’effectif est de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros ou dont le total de bilan n’excède pas 43 millions d’euros, ayant ou non un comité social et économique, sont tenues à une obligation d’information des salariés préalablement à la mise en œuvre d’un projet de cession de fonds de commerce ou de plus de 50% des parts sociales, des actions ou des valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital.
En effet, en vertu de la loi du 31 juillet 2014 n°2014-856 dite loi «Hamon» en cas de projet d’opération de vente, les salariés doivent être informés de la possibilité qu’ils ont de présenter une offre d’achat de leur entreprise.
Les entreprises de 50 salariés et plus, dotées d’un CSE doivent informer les salariés au plus tard au cours de l’information et de la consultation du CSE sur l’opération.
Les autres entreprises doivent informer les salariés par tout moyen, celui-ci devant tout de même permettre de conférer date certaine à la transmission de l’information, objet de l’obligation.
En cas de manquement, une amende civile est prévue par les textes, dont le montant est plafonné à 2% du montant de la vente.
Dix ans après son entrée en vigueur, la loi « Hamon » continue de donner lieu à de nombreux débats et fait toujours l’objet de questions sans réponses claires quant à son champ d’applications.
Récemment, la question de son applicabilité s’est posée dans le cadre de la cession d’une participation majoritaire dans le capital d’une SARL ou d’une SA détenue en indivision par plusieurs associés ou actionnaires.
L’Association nationale des sociétés par actions (Ansa), a pris position sur la question dans un avis du 5 juin 2024 (n°24-026).
Selon son analyse, des titres ou une participation, détenus en indivision, peuvent être assimilés à une «entit » indissociable puisque leur cession ne peut intervenir qu’avec l’accord de tous les indivisaires, en un seul bloc, et lors d’une cession unique.
Ainsi, l’Ansa recommande l’application de la loi Hamon dans ce contexte. Une telle approche se justifie, d’une part, par la fidélité à l’esprit du texte de la loi Hamon dont la vocation est de faire bénéficier le plus grand nombre de salariés de la possibilité de racheter leur entreprise, et d’autre part par la nécessité de rester prudent (eu égard au montant potentiel de l’amende encourue).
Les interrogations et les incertitudes quant à l’application de la loi Hamon demeurent, comme le démontre la position de l’Ansa et ce, principalement, en raison de la rédaction lacunaire du texte.
La pertinence même du dispositif fait débat, ce dernier complexifiant et ralentissant inutilement les opérations.
La présentation du projet de la loi de simplification de la vie économique porté par Bruno Le Maire en avril dernier prévoyait une adaptation du texte de la loi Hamon réduisant le délai d’information préalable.
A l’occasion de l’examen du projet de loi, interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale, le Sénat a adopté un amendement supprimant intégralement le dispositif de la loi Hamon, allant ainsi plus loin encore que la proposition initiale.
Le texte est à présent renvoyé à l’Assemblée nationale et en attente de son examen par la commission spéciale constituée à cet effet qui devrait intervenir entre la fin de l’année 2024 et le début de 2025.
AUTEUR
Caroline FROGER-MICHON, Avocate associée, CMS Francis Lefebvre Avocats
Jehane AZZOUZI-CLAUSEL, Juriste, CMS Francis Lefebvre Avocats
Cet article a été publié dans La lettre des FUSIONS-ACQUISITIONS ET DU PRIVATE EQUITY du 16 décembre 2024 – Dossier : Acquérir, céder ou conserver une entreprise familiale
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