Anticiper le statut collectif applicable à la NewCo
4 avril 2024
Lorsqu’une opération implique un changement d’employeur et l’application de l’article L.1224-1 du Code du travail, les contrats de travail sont automatiquement transférés au nouvel employeur. Dans de nombreuses opérations, ce transfert se fera vers une NewCo, spécialement constituée à cet effet.
Les conséquences du transfert de salariés sur le statut collectif
Pour ce qui concerne les accords collectifs, le Code du travail prévoit un dispositif spécifique de mise en cause des accords (article L.2261-14 du Code du travail). Ces accords restent en vigueur au cours d’une période dite de «survie provisoire» d’un an maximum. Cette période d’un an ne s’ouvre qu’à l’issue d’un délai de préavis de trois mois, sauf clause prévoyant une durée supérieure. Au total, la survie provisoire des accords collectifs est donc au minimum de 15 mois.
Au cours du délai de préavis, une négociation d’un accord de substitution doit être engagée à la demande d’une des parties intéressées. Le but de cet accord de substitution est en effet d’adapter «post-transfert» le statut collectif ou d’élaborer de nouvelles dispositions, pour permettre de définir les avantages sociaux qui seront applicables aux salariés ainsi transférés au sein d’une NewCo, par hypothèse vierge de statut collectif.
Le nombre de conventions et d’accords collectifs mis en cause au cours d’une opération peut se révéler conséquent.
Il apparaît ainsi particulièrement opportun de pouvoir anticiper la négociation du statut collectif des salariés amenés à être transférés.
C’est également un bon moyen de rassurer les salariés et partenaires sociaux quant aux règles qui leur seront applicables après leur transfert au sein de la NewCo.
D’abord d’origine jurisprudentielle, la négociation d’accords d’anticipation a été consacrée par la loi en 2016. Cette négociation a pour objet d’anticiper la négociation de l’accord de substitution, plutôt que d’attendre l’ouverture de la période de survie provisoire.
Le but de l’accord de transition
Ainsi, l’accord de transition consiste à négocier un accord tripartite entre les employeurs successifs ainsi que les organisations syndicales représentatives dans l’entreprise d’origine.
Cet accord, dont la durée ne peut excéder trois ans et qui n’entre en vigueur qu’à la réalisation de l’opération ayant entraîné la mise en cause, porte sur les mêmes objets que les accords mis en cause et a pour but de mettre en place une étape intermédiaire avant l’application du statut collectif de l’entreprise d’accueil aux salariés transférés.
Dans le cadre du transfert vers une NewCo, le but de cet accord sera d’adapter le statut collectif des salariés transférés en faisant éventuellement disparaître certains avantages ou en en créant de nouveaux, mais surtout en maintenant certaines dispositions conventionnelles.
Sa conclusion pourra avoir lieu à partir du moment où est envisagée l’opération. En pratique, les négociations pourront être engagées à l’issue de la consultation du CSE sur l’opération envisagée.
Cet accord est régi par les conditions de validité de droit commun des accords d’entreprise, c’est-à-dire qu’il doit être signé par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives, ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des membres titulaires du CSE.
A défaut, l’accord peut également être valablement conclu s’il est signé par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30% des suffrages puis soumis à une consultation des salariés par référendum. Les taux de 50% et 30% sont appréciés dans le périmètre de l’entreprise d’origine.
AUTEUR
Caroline Froger-Michon, Avocate associée, CMS Francis Lefebvre Avocats
Cet article a été publié dans La lettre des FUSIONS-ACQUISITIONS ET DU PRIVATE EQUITY du 25 mars 2024
A lire également
L’accès aux messages instantanés du salarié par l’employeur... 30 octobre 2020 | CMS FL Social
Application d’une loi étrangère au contrat de travail : conditions et limite... 13 novembre 2015 | CMS FL
Des précisions sur le travail dominical autorisé dans certaines zones géograp... 5 janvier 2016 | CMS FL
Quelle place pour l’IA dans les relations du travail ?... 3 avril 2024 | Pascaline Neymond
Des salariés au conseil d’administration : un pas vers la cogestion ?... 8 juillet 2013 | CMS FL
Mobilité intra-communautaire : quelle est la force probante du certificat A1?... 20 janvier 2016 | CMS FL
Contester la validité de son forfait-jours n’est pas sans risque... 14 avril 2022 | Pascaline Neymond
Révocation de mandat social et licenciement : les liaisons dangereuses... 29 septembre 2023 | Pascaline Neymond
Articles récents
- Pas de co-emploi sans immixtion dans la gestion économique et sociale de la société : illustration en présence d’une société d’exploitation
- Fixation du plafond de la sécurité sociale pour 2025
- Un salarié licencié pour harcèlement sexuel ne peut se prévaloir du phénomène «#Metoo»
- Régimes de retraite des dirigeants : prestations définies versus actions gratuites
- SMIC : Relèvement du salaire minimum de croissance au 1er novembre 2024
- Inaptitude et reclassement : c’est au salarié qu’il appartient de rapporter la preuve d’une déloyauté de l’employeur
- Conférence – Gestion des fins de carrière : que font les entreprises et quelles solutions à dispositions ?
- [MAJ] – Visites médicales : les nouveaux modèles de documents remis au travailleur à l’occasion des visites réalisées par la médecine du travail sont publiés
- Visites médicales : les nouveaux modèles de documents remis au travailleur à l’occasion des visites réalisées par la médecine du travail sont publiés
- Forfait jours : quel contenu pour la convention individuelle de forfait ?