Qualité de co-employeur au sein d’un groupe de sociétés
 
                                  20 octobre 2015
L’identification de l’employeur au sein d’un groupe de sociétés est, depuis plusieurs années, source d’un important contentieux qui a conduit la Cour de cassation à faire évoluer les critères de reconnaissance de la relation salariée.
En effet, alors que, dans ses premiers arrêts, la Haute juridiction adoptait une approche purement individuelle du co-emploi et exigeait que soit établi un lien de subordination entre le salarié et la société prétendument « co-employeur« , les magistrats ont progressivement développé, en marge de cette première acception, une approche collective fondée sur la confusion d’intérêts, d’activité et de direction entre l’employeur et la société dont la responsabilité est recherchée.
Toutefois, cette dernière solution a rapidement conduit à une multiplication des contentieux, certains salariés y voyant une opportunité pour mettre en cause des sociétés qu’ils considéraient plus solvables que leur employeur contractuel.
Face à ce constat, la Cour de cassation a dû recadrer la notion de co-emploi. C’est dans cette perspective, et dans le prolongement d’un arrêt du 2 juillet 2014, que s’inscrit la décision du 9 juin 2015 (Cass. soc., 9 juin 2015, nos 13-26558 à 13-26566).
Dans cette affaire, trois sociétés, liées à la société ITM par un contrat de franchise, exerçaient une activité de vente au détail d’habillement sous la marque « Veti ». A la suite d’un rapprochement avec le groupe Kiabi en 2009, la société ITM avait cessé d’exploiter la marque « Veti » au profit de la marque « Kiabi ».
Les trois sociétés concernées ne s’étant pas associées à cette opération, leurs parts sociales avaient été rachetées par une filiale de la société ITM. Les salariés de ces sociétés, licenciés pour motif économique suite à la cessation d’activité de leur employeur contractuel, ont engagé une action contentieuse pour voir condamner la société ITM à leur payer diverses sommes en qualité de co-employeur.
Leur demande n’a toutefois pas été accueillie par la Cour de cassation qui, après avoir rappelé les critères précités du co-emploi, a considéré que les seules circonstances ci-après étaient insuffisantes à caractériser le co-emploi :
- une équipe dirigeante identique avait été constituée ;
- la société ITM avait, d’une part, pris dans le cadre de la politique du groupe des décisions affectant le devenir de ses filiales et d’autre part, fourni les moyens nécessaires à la cessation d’activité des sociétés.
Le co-emploi nécessite davantage qu’une simple coordination des activités économiques. Il requiert l’existence d’une véritable ingérence dans la gestion économique et sociale de la filiale qui se trouve dépossédée de toute capacité de prise de décision autonome, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
Auteur
Florence Habrial, avocat en droit du travail et droit de la protection sociale.
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