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Recherche de solutions aux difficultés des entreprises : de nouvelles opportunités

Les (trop) nombreuses modifications apportées au régime juridique du traitement des difficultés des entreprises par l’ordonnance n°2014-326 ne constituent nullement, malgré 117 articles1 dédiés, une refonte du droit de l’entreprise en difficulté mais un rééquilibrage des mécanismes gouvernant cette matière. Elles ne peuvent malheureusement pas être exposées de manière exhaustive dans ces colonnes.

Parmi les points positifs issus de cette ordonnance, le renforcement de la boîte à outils permettant de bâtir une solution répondant aux objectifs de poursuite de l’activité, de maintien de l’emploi et d’apurement du passif doit être approuvé. Celui-ci réside notamment dans une certaine «collectivisation» des procédures amiables (I), dans la consécration de la liquidation judiciaire prépackée (II) et dans le renforcement de l’efficacité des comités de créanciers (III) dont le régime paraît, enfin, arrivé à maturité.

Ces nouveautés offrent aux différents acteurs de nouvelles opportunités constituant autant de chances supplémentaires de satisfaire aux objectifs précités.

I – «Collectivisation» des procédures amiables

La «collectivisation» des procédures amiables s’entend de l’alignement du régime de ces dernières sur celui des procédures collectives. L’ordonnance du 12 mars 2014 opère en effet un rapprochement du régime du mandat ad hoc et de la conciliation avec celui de la sauvegarde, du redressement et, même, de la liquidation judiciaire.

Ce mouvement collectiviste est spécialement illustré par l’introduction d’un article L.611-16 C. com.. Ce texte répute non écrite (i) toute clause qui modifie les conditions de poursuite d’un contrat en cours en diminuant les droits ou en aggravant les obligations du débiteur du seul fait de la désignation d’un mandataire ad hoc ou de l’ouverture d’une procédure de conciliation ou d’une demande formée à cette fin ainsi que (ii) toute clause mettant à la charge du débiteur, du seul fait de la procédure amiable, les honoraires du conseil auquel le créancier a fait appel dans le cadre de ces procédures au-delà d’un plafond fixé par un décret à venir.

D’autres innovations, telles le renforcement du pouvoir d’investigation du président du tribunal, l’extension des pouvoirs de ce dernier quant à la faculté d’imposer des délais aux créanciers du débiteur ou, encore, la création d’un mandataire à l’exécution de l’accord, comme il existe un commissaire à l’exécution du plan de sauvegarde ou de redressement, participent de ce même mouvement.

Au regard de cette «collectivisation» en marche, il est étrange de relever que le Gouvernement semble avoir encadré, opportunément pensons-nous, l’information des institutions représentatives du personnel du fait d’une procédure amiable. L’article L.611-8-1 dispose en effet que le comité d’entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel sont informés par le débiteur du contenu de l’accord lorsque celui-ci en demande l’homologation. Le moment et l’étendue de l’information sont précisés, sans préjudice de l’application du droit commun de l’information/consultation.

II – Liquidation judiciaire prépackée

Deux dispositions consacrent et régissent cette pratique naissante.

Le nouvel article L.611-7 permet ainsi, sur demande du débiteur et après avis des créanciers, de confier au conciliateur une mission ayant pour objet l’organisation d’une cession partielle ou totale de l’entreprise sous conciliation.

Cette cession pourra être mise en œuvre dans le cadre soit de la conciliation, soit, le cas échéant, d’une sauvegarde, d’un redressement ou d’une liquidation judiciaire ultérieurs, selon un formalisme adapté tenant compte des démarches effectuées au cours de la conciliation (art. L.642-2).

III – Efficacité des comités de créanciers

La première mesure tient dans le possible alignement des délais accordés aux comités pour se prononcer avec la durée de la période d’observation (art. L.626-34) en lieu et place du délai strictement limité, sans justification pertinente, à 6 mois à compter du jugement d’ouverture. Créanciers et débiteur pourront enfin mener des négociations plus sereines dans un cadre temporel rationnel.

L’importance de cette extension de la durée ouverte aux comités pour travailler est à mettre directement en relation avec le renforcement du pouvoir des créanciers. En effet, les créanciers y disposent désormais d’un pouvoir d’initiative concurrent à celui du débiteur et pourront, individuellement ou collectivement, bâtir, sous la forme d’un plan de sauvegarde ou de redressement, une solution de retournement alternative à celle proposée par le débiteur (art. L.626-30-2).

Par ailleurs, l’existence et la portée des conventions de vote au sein des comités sont consacrées par l’ordonnance (art. L.626-30-2). Leur respect est soumis au contrôle du président du tribunal statuant en référé.

Enfin, les porteurs d’obligations dont une part des créances est garantie par une fiducie sont exclus du droit de voter à l’assemblée des obligataires au titre de leurs créances ainsi sécurisées.

 

Notes

1 Auxquels doivent s’ajouter près de 150 articles au titre du décret d’application annoncé pour le 1er juillet 2014 ainsi, qu’une éventuelle seconde ordonnance dont l’objet principal porterait sur la possibilité d’exproprier de leurs droits sociaux les actionnaires du débiteurs.

 

A propos des auteurs

Alexandre Bastos, avocat. Spécialisé en droit de l’entreprise en difficulté, il intervient en qualité de conseil (y compris intervention, assistance et représentation devant les Tribunaux et autres organes de procédure).

Guillaume Bouté, avocat en droit des contrats.

 

Analyse juridique parue dans la revue Option Finance le 22 avril 2014

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