Gestion sociale du Covid : nos voisins ont-ils été plus créatifs ? Le cas de l’Italie

27 juillet 2021
Notre tour d’horizon des dispositifs mis en place par nos voisins européens pendant la crise sanitaire se poursuit avec l’Italie. Le gouvernement italien s’est démarqué d’autres Etats européens par une mesure phare qu’est l’interdiction des licenciements économiques, mais pas que.
En Italie, pour faire face à la crise engendrée par la pandémie, de nombreuses mesures ont été introduites. Ces mesures reposaient sur deux axes principaux : d’une part, la protection de la santé des travailleurs, avec des actions visant à encourager le télétravail et, d’autre part, la protection de leurs emplois, avec l’interdiction des licenciements économiques, tant individuels que collectifs, et la mise en œuvre de mesures appropriées de soutien aux entreprises semblables à notre activité partielle (dits CIGO, CIGS, CIGD), sans baisse minimale d’activité requise.
Parmi les mesures phares de cette gestion de crise, c’est certainement l’interdiction des licenciements économiques qui a distingué l’Italie des autres pays, européens et non européens, eu égard à la durée et la rigidité de la mesure.
En effet, l’interdiction des licenciements économiques, sous peine de nullité, empêchait et empêche encore aujourd’hui sous certaines conditions, d’engager des procédures de licenciement individuel et des licenciements collectifs pour motif économique mais entrainait également la suspension des procédures en cours.
Cette interdiction, en vigueur depuis le 17 mars 2020 a pris fin progressivement, à compter du 1er juillet 2021 pour certains secteurs comme l’industrie et le bâtiment, tandis que pour tous les autres secteurs, le gouvernement a fixé la date de fin de cette interdiction au 31 octobre 2021.
Il s’agit d’une limitation considérable des pouvoirs de l’employeur, qui a soulevé plus d’un doute quant à sa constitutionnalité et qui aura duré au moins 493 jours (étant précisé que les syndicats italiens font pression sur le gouvernement pour prolonger la mesure au-delà du 31 octobre).
De rares exceptions ont été introduites à cette règle, en vertu desquelles il demeure possible de licencier pour motif économique en cas de faillite ou par la voie d’un cas d’accord collectif, semblable à notre rupture conventionnelle collective.
Afin de soutenir les entreprises, en particulier celles qui, pendant la pandémie, ont vu leur activité réduite à zéro, l’interdiction des licenciements a été combinée avec un système d’allègement de charges sociales. Ces mécanismes ont permis de soutenir les entreprises, en réduisant le coût des salaires.
L’autre mesure principale visant à contrer les effets de la pandémie a été le recours massif au télétravail, que le gouvernement a fortement défendu et promu sans toutefois le rendre obligatoire.
Comme dans le reste du monde, l’utilisation du télétravail a connu en Italie un essor sans précédent.
Toutefois, le phénomène a eu un impact particulièrement significatif en Italie si l’on considère qu’avant la pandémie le nombre de télétravailleurs dans le pays n’atteignait pas 5% de la main-d’œuvre, alors que pendant la pandémie il a atteint environ 72% (données du rapport Assolombarda n°4 de 2021).
En raison de la pandémie et jusqu’au 31 décembre 2021, et par dérogation aux règles normalement applicables, un employeur peut imposer le travail à distance à ses salariés sans devoir conclure d’avenant spécifique avec eux.
Enfin, pour tenter de contrer les pertes d’emploi des règles particulières ont été introduites s’agissant des contrats à durée déterminée.
En Italie, le droit commun prévoit que les contrats à durée déterminée ne peuvent être conclus que pour douze mois. En outre, les contrats à durée déterminée peuvent être prolongés ou renouvelés au maximum 4 fois.
Pendant la pandémie et jusqu’au 31 décembre 2021, il est prévu que les contrats à durée déterminée peuvent être prolongés ou renouvelés librement sans condition.
Article publié dans Les Echos le 27/07/2021
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