Egalité de traitement : des salariés peuvent-il revendiquer une prime de panier prévue par un accord collectif d’établissement au profit de salariés d’un autre établissement

5 octobre 2022
Dans un arrêt (n°21-15.341 à 21-15.355) qu’elle a rendu le 28 septembre 2022 concernant 14 salariés et un syndicat et visant des affaires où le Cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats représentait l’employeur depuis l’origine du contentieux devant le conseil de prud’hommes de Marseille puis devant la cour d’appel d’Aix en Provence, la Cour de cassation s’est prononcée au sujet de l’égalité de traitement en la présence d’un accord collectif.
Elle a tout d’abord rappelé le principe selon lequel «les différences de traitement entre les salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accords d’établissement négociés et signés par les organisations syndicales représentatives au sein de ces établissements (….) sont présumées justifiées de sorte qu’il appartient à celui qui les conteste de démontrer qu’elles sont étrangères à toutes considérations de nature professionnelle».
En l’espèce, un accord collectif d’établissement issu de la négociation annuelle obligatoire prévoyait une prime de panier accordée exclusivement aux salariés affectés à l’établissement de Cadarache.
Plusieurs salariés relevant d’autres établissements revendiquaient cette prime de panier, laquelle leur a été accordée par la cour d’appel. Cette dernière a retenu, pour ce faire, que le fait que :
-
- les salariés affectés sur le site de Cadarache perçoivent une prime de panier forfaitaire et identique quel que soit leur lieu d’habitation ;
-
- que la prime n’est pas versée en fonction de la distance séparant le domicile des salariés de leur lieu de travail qui les empêcherait de rentrer déjeuner chez eux ;
-
- que le coût des repas sur place peut être variable en fonction du choix du salarié, ne constituait pas une raison objective d’attribution de la prime.
Cette décision de la cour d’appel a été censurée par la Cour de cassation : « en statuant ainsi alors que l’accord d’établissement (…) permettait de présumer que les différences de traitement entre les salariés appartenant à la même entreprise mais affectés à des établissements distincts étaient justifiées, la cour d’appel a violé le principe susvisé » (soit celui de l’égalité de traitement).
Les arrêts de la cour d’appel ont donc été cassés et annulés en ce qu’ils ont condamné l’employeur:
-
- à payer une somme, pour chacun des 14 salariés, de l’ordre de 10.000 euros à titre de rappel de prime de panier ;
-
- à payer au syndicat les sommes de 80 euros à titre de dommages et intérêts et de 50 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, pour chacun des salariés à la procédure.
Dans deux autres arrêts qu’elle a rendus le même jour (n°21-15.356 et 21-15.347), la Cour de cassation a retenu une motivation similaire et a censuré de la même manière et avec des conséquences identiques les arrêts de la même cour d’appel s’agissant, cette fois, d’une prime de trajet.
Related Posts
Présomption de justification des avantages conventionnels : un nouveau cas d’... 18 mars 2025 | Pascaline Neymond

Salarié inapte : Faut-il toujours lui notifier les motifs s’opposant à son r... 23 mars 2022 | Pascaline Neymond

Modalités de vote au sein du comité de groupe : les précisions du Tribunal ju... 30 septembre 2021 | Pascaline Neymond

La modification de la rémunération par l’employeur autorise-t-elle encore la... 13 janvier 2015 | CMS FL

Les causes d’annulation des élections professionnelles récemment rappelées ... 7 février 2017 | CMS FL

La contestation d’une maladie professionnelle reconnue par la CPAM après inte... 17 avril 2019 | CMS FL

Le harcèlement moral : l’épreuve de la preuve... 10 juin 2013 | CMS FL
Pas de répit pour les employeurs en 2019!... 21 février 2019 | CMS FL

Articles récents
- Intelligence artificielle : le forçage de la consultation du CSE
- Les arrêts du 10 septembre 2025 sur les congés payés ou le syndrome du juge légiférant
- Conférence : Introduction de l’IA en entreprise : décrypter et maîtriser les enjeux juridiques
- Congés payés : la Cour de cassation poursuit la mise en conformité du droit français avec le droit de l’Union européenne
- Actualité sociale de l’été et de la rentrée 2025
- L’IA suspendue : le juge exige la consultation du CSE avant tout déploiement
- Droit Social + marque une pause estivale
- Sanctionner le management toxique : le comportement de l’employeur ne minore pas la faute du salarié
- Mi-temps thérapeutique : un temps partiel original ?
- Uber n’est pas un employeur