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Le recours à la médiation : une opportunité pour régler les différends en matière de droit du travail

Le recours à la médiation : une opportunité pour régler les différends en matière de droit du travail

La médiation est un processus de règlement amiable des différends qui peut intervenir dans différents domaines du droit, tant en matière civile, commerciale qu’administrative. La médiation présente un intérêt tout particulier en droit du travail.

 

La médiation se définit comme un processus par lequel les parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par leur soin :

 

    • soit dans un cadre conventionnel, la médiation conventionnelle ;
    • soit suite à une désignation par le juge avec l’accord des parties, dans le cadre d’une action contentieuse, la médiation judiciaire.

 

La médiation : un processus d’élaboration législatif et règlementaire long et complexe

Le cadre juridique de la médiation a mis longtemps à se construire depuis son introduction dans notre dispositif législatif par une loi n°95-125 du 8 février 1995 et son décret d’application n°96-652 du 22 juillet 1996.

La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, vient de mettre une touche finale au dispositif, en confirmant la volonté du législateur de développer la culture du règlement amiable des différends, « afin que ne soit porté devant le juge que les affaires les plus contentieuses, pour lesquelles les parties n’ont pu trouver ensemble de solutions amiables et afin d’apaiser autant que possible les échanges entre les parties ».

C’est ainsi que suivant le nouvel article 22-1 de la loi du 8 février 1995 :

 

« en tout état de la procédure, y compris en référé, lorsqu’il estime qu’une résolution amiable du litige est possible, le juge peut, s’il n’a pas recueilli l’accord des parties, leur enjoindre de rencontrer un médiateur qu’il désigne… ».

 

Un processus identique pour la médiation conventionnelle et judiciaire

Qu’elle soit d’origine conventionnelle ou judiciaire, la médiation obéit à un même processus.

Chaque partie à la médiation que l’on dénomme usuellement « Médié », va pouvoir grâce au médiateur renouer le dialogue, afin de trouver une solution qui ne leur sera pas imposée par la justice, soit par un juge, soit par un conciliateur.

Les médiés pourront donc, chacun assisté par leur avocat, accepter d’entrer dans le processus de médiation.

Le médiateur a pour rôle de comprendre de façon neutre et objective, sans à priori les positions de chacun et par le recours à différentes techniques de permettre aux médiés de s’écouter et de se comprendre réciproquement.

 

Un processus adapté en matière de droit du travail

Les relations en droit du travail génèrent de nombreux conflits.

On distingue classiquement :

 

    • les conflits d’ordre individuel, entre un salarié et son employeur pouvant résulter de diverses situations telles que :
    • le non-respect du contrat travail ;
    • un désaccord sur les conditions d’emploi (durée du travail rémunération, qualification, mobilité, etc.) ;
    • des faits de harcèlement moral ;
    • une procédure de sanction mal acceptée ;
    • une procédure de licenciement contestée.
    • les conflits d’ordre collectif entre des représentants du personnel ou des organisations syndicales et la direction d’une entreprise tels que :
    • un conflit collectif, une menace de grève, un lock-out, etc. ;
    • un dialogue social conflictuel ;
    • la difficulté de négocier et conclure un accord d’entreprise ;
    • une négociation difficile d’un plan de sauvegarde l’emploi ;
    • un désaccord avec des représentants du personnel sur le recours à une expertise demandée par des élus, sur une procédure d’alerte économique ;
    • une action en délit d’entrave au fonctionnement des instances représentatives du personnel.

 

Dans toutes ces hypothèses, le recours à la médiation peut favoriser une solution rapide et pérenne, tant pour l’entreprise que pour le salarié ou les partenaires sociaux.

La médiation présente en effet un intérêt tout particulier lorsqu’il s’agit de préserver la relation future. En effet avec l’aide du médiateur, les médiés pourront trouver un accord qui va leur permettre de poursuivre leurs relations de travail dans des conditions acceptées par tous et donc de créer un contexte favorable pour restaurer la confiance.

Lorsque la médiation intervient à la suite d’une rupture de la relation contractuelle, elle pourra permettre au salarié de s’exprimer et de communiquer avec son ancien employeur en dehors du contexte formel de la procédure de licenciement.

La libération de la parole favorise les échanges et l’émergence de nouvelles idées ou la clarification de situations anxiogènes ou destructives.

 

La médiation, un processus structuré

La médiation se déroule dans un espace-temps limité et dans un cadre extérieur à l’entreprise devant présenter toutes les garanties de confidentialité et de neutralité requises, et permettre aux salariés ou aux partenaires sociaux de sortir du cadre normal de l’entreprise et de la relation hiérarchique.

La durée initiale de la médiation judiciaire est fixée par le juge à trois mois et peut faire l’objet d’un renouvellement à la demande du médiateur.

En cas de médiation conventionnelle, il appartient aux parties de définir la durée de la médiation et de son ou de ses renouvellements.

 

La médiation se décompose en plusieurs phases :

 

    • première phase : le lancement

Cette phase nécessite que les parties ou les médiés se mettent d’accord sur le recours à la procédure de médiation par la signature d’une convention de médiation qui fixera les délais et les modalités pratiques, ainsi que la rémunération du médiateur.

 

    • seconde phase : le déroulement de la médiation

Elle doit permettre de déterminer les besoins et les intérêts de chacun et de les faire comprendre par toutes les parties.

Les parties peuvent être accompagnées par leur avocat, ce qui est préférable pour leur permettre de s’exprimer en toute sécurité.

Le médiateur ne dispose pas de pouvoir d’instruction. Il peut cependant avec l’accord des parties et pour les besoins de la médiation, entendre les tiers qui y consentent.

La médiation va alors pouvoir s’exécuter sous la direction du médiateur qui va devoir entendre les médiés et confronter leurs points de vue au cours d’entretiens, soit individuels soit collectifs, afin de les aider à rétablir une communication et à trouver par elles-mêmes un accord mutuellement acceptable, total ou partiel.

Le médiateur est astreint à une éthique très stricte, gouvernée par les règles d’indépendance, de consensualisme, de confidentialité et d’autorité.

 

    • troisième phase : la solution

Cette dernière phase doit permettre aux médiés de construire ensemble une solution leur donnant mutuellement satisfaction.

Si les parties trouvent un accord celui-ci donnera lieu à sa rédaction par les avocats.

Les parties peuvent décider de soumettre l’accord à l’homologation du juge, qui lui donnera force exécutoire.

Si les parties ne sont pas parvenues à un accord, en cas de médiation judicaire, le médiateur doit en informer le juge sans révéler ni les raisons qui ont conduit à l’échec de la médiation, ni les échanges intervenus. L’instance reprend alors son cours ordinaire.

À l’expiration de sa mission, le juge fixe alors la rémunération du médiateur et l’autorise à se faire remettre jusqu’à due concurrence les sommes consignées au greffe.

Le juge peut ordonner s’il y a lieu le versement de sommes complémentaires en indiquant là où les parties qui en ont la charge, ou la restitution des sommes consignées en excédant.

À défaut d’accord, ces frais sont répartis à parts égales, à moins que le juge estime qu’une telle répartition est inéquitable au regard de la situation économique des parties.

Le coût de la médiation conventionnelle est fixé dans la convention de médiation et est partagé entre les parties suivant les conditions de leur accord.

 

Conclusion

La médiation est un dispositif nouveau qui a mis du temps à s’insérer dans un cadre juridique clair mais qui constitue le mode de règlement alternatif des litiges le plus efficace et le plus facile à mettre en œuvre.

Le cadre législatif et règlementaire existe et il appartient maintenant aux salariés, aux entreprises, à leurs directions des ressources humaines et juridiques, aux avocats et aux magistrats de se l’approprier, pour permettre de limiter les conflits en droit du travail, afin de ne réserver au juge que les litiges qui requièrent l’application ou l’interprétation d’une règle de droit.

La médiation a pleinement vocation à s’appliquer à tous les conflits qui nécessitent de dénouer des relations humaines complexes et de favoriser le dialogue social.

 

Article publié dans Les Echos le 11/12/2019

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