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Le bailleur peut-il s’exonérer d’une partie de son obligation de délivrance ?

Le bailleur peut-il s’exonérer d’une partie de son obligation de délivrance ?

Par un arrêt du 18 janvier 2018, auquel il a été conféré une publicité renforcée, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a réaffirmé le caractère essentiel de l’obligation de délivrance incombant au bailleur (Cass. 3e civ., 18 janvier 2018, n°16-26.011).
En l’espèce, un bail avait été conclu pour l’installation d’une crèche et le locataire avait parallèlement confié à une entreprise un contrat de promotion immobilière pour des travaux de réhabilitation à réaliser dans les locaux concernés. Dans le cadre de ces travaux, il avait été découvert des plaques de fibrociment contenant de l’amiante dont le traitement entraînait un surcoût que le locataire entendait faire supporter à son bailleur.

En appel, les juges ont débouté le locataire de sa demande au motif que le contrat confié au promoteur comprenait une obligation de résultat concernant le contrôle de la conformité aux règles de sécurité, d’hygiène et d’urbanisme, y compris par conséquent celles relatives à la présence d’amiante, et que le projet de promotion immobilière était annexé au bail de sorte que le locataire ne pouvait ni se prévaloir de son ignorance quant à la présence d’amiante, ni reprocher au bailleur de ne pas l’avoir dénoncée.

Dans un attendu clair et concis, la Cour de cassation a censuré la décision des juges d’appel en retenant que « les obligations pesant sur le promoteur immobilier envers le preneur, au titre de travaux de réhabilitation de l’immeuble loué, n’exonèrent pas le bailleur, tenu d’une obligation de délivrance, de la prise en charge des travaux nécessaires à l’activité stipulée au bail, sauf clause expresse contraire ».

Cette décision de la Haute juridiction s’inscrit dans la ligne de sa jurisprudence antérieure en ce qu’elle rappelle le caractère fondamental de l’obligation de délivrance du bailleur qui impose à ce dernier de mettre à disposition un local apte à servir à l’usage pour lequel il est destiné. Toutefois, la Cour reconnaît dans le même temps la possibilité pour le bailleur de s’exonérer d’une partie de son obligation de délivrance, en transférant sur le locataire la charge de travaux nécessaires à l’activité stipulée au bail, pour autant qu’une clause le prévoie expressément.

Si l’on peut regretter que la Cour de cassation n’ait pas précisé les limites de l’efficacité de tels aménagements contractuels, l’on peut légitimement considérer que ceux-ci ne devront pas, en tout état de cause, conduire à priver l’obligation de délivrance de sa substance, sous peine d’être réputés non écrits.

Dans l’attente d’autres décisions qui viendraient préciser ce point, les rédacteurs devront donc être particulièrement vigilants lors de la mise en place de clauses ayant pour objet de limiter l’obligation de délivrance.

 

Auteur

Laurent Toulze, avocat, droit immobilier et construction

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