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Open data. Toujours un décret en attente !

Open data. Toujours un décret en attente !

L’article 5 de la loi n°2015-1779 du 28 décembre 2015 a instauré le principe de gratuité de l’accès aux informations du secteur public. Très bientôt, ce ne sera donc que par dérogation au droit commun que des redevances de réutilisation des données pourront être exigées par les administrations publiques.

Pour que ce dispositif puisse entrer en vigueur, toutefois, un décret d’application était annoncé. Il devait :

  • établir la liste des administrations autorisées à demander des redevances d’utilisation ;
  • préciser les informations ou catégories d’informations qui pourront justifier la perception d’une redevance ;
  • définir les modalités de calcul de ces redevances.

Un décret est en effet paru, au cœur de l’été : le décret n°2016-1036 du 28 juillet 2016 relatif au principe et aux modalités de fixation des redevances de réutilisation des informations du secteur public. Il ne traite toutefois que deux de ces trois points : il définit les administrations autorisées à percevoir des redevances et les modalités de calcul desdites redevances. On pourra s’étonner de la dissociation qui a été faite entre les administrations concernées et les informations et catégories d’informations éligibles à la perception de telles redevances. Il est vrai que le point est épineux et que les retouches apportées au dispositif par la loi pour une République numérique nécessitaient probablement de différer la publication de ce dernier décret (voir sur ce point notre focus).

Autre surprise : le décret du 28 juillet 2016 ne répond pas aux exigences de la loi, désormais codifiées à l’article L.324-4 du Code des relations entre le public et l’Administration (CRPA), qui prévoyait qu’une « liste des catégories d’administrations » concernées serait établie. En pratique, le décret ne dresse pas de liste, mais pose plus simplement des critères ouvrant droit, pour les administrations, à percevoir des redevances (article R.324-4-1 du CRPA). Sont ainsi concernées les personnes publiques qui, cumulativement :

  • sont listées à l’article L.300-2 du CRPA, c’est-à-dire « l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que […] les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une […] mission [de service public] » ;
  • ont pour activité principale « la collecte, la production, la mise à disposition ou la diffusion d’informations publiques » ;
  • voient les coûts liés à cette activité principale couverts à moins de 75% par des recettes fiscales, des dotations ou des subventions.

Ce dernier critère précise l’exigence de l’article L.324-1 du CRPA, selon lequel les administrations pouvant exiger le paiement de redevances devaient couvrir par des recettes propres une « part substantielle des coûts liés à l’accomplissement de leurs missions de service public ». On pourrait argumenter que les finances d’une personne publique pourraient être mises en péril, avec l’obligation de gratuité, bien avant d’atteindre cette capacité d’autofinancement de 25%. Mais c’est néanmoins à ce niveau que le « curseur » a été placé.

Les personnes publiques et privées n’atteignant pas ce pourcentage devront trouver de nouvelles sources de financement sans tarder : le décret doit entrer en vigueur le 1er janvier 2017. Sous réserve toutefois que le décret listant les informations ou catégories d’informations pouvant donner lieu à redevance ait été publié d’ici là.

Quant aux modalités de calcul à appliquer, elles sont définies dans les nouveaux articles R.324-4-2 à R.324-4-5 du CRPA. Les coûts liés à la collecte, à la production, à la mise à disposition ou à la diffusion des informations publiques, qui seuls peuvent permettre la perception d’une redevance, sont établis en faisant une moyenne des coûts réels de ces opérations sur les trois derniers exercices disponibles. La moyenne peut toutefois être établie sur les dix derniers exercices lorsque les informations concernées sont issues des opérations de numérisation des fonds et des collections des bibliothèques. Le coût de l’anonymisation des documents peut également y être intégré. Les personnes publiques concernées devraient donc assez rapidement modéliser ces coûts, même sans savoir quels seront les documents dont la réutilisation permettra réellement la perception desdites redevances.

Au vu de ces difficultés pratiques, on ne peut qu’espérer que le prochain décret soit rapidement publié.
 

Auteurs

Anne-Laure Villedieu, avocat associée en droit de la propriété industrielle, droit de l’informatique, des communications électroniques et protection des données personnelles.

Hélène Chalmeton, juriste au sein du Département droit des affaires, en charge du knowledge management.

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