Employeurs : quelles mesures prendre face au coronavirus ?

3 mars 2020
Alors que les foyers de contamination se multiplient dans le monde, notamment en Europe où la France est désormais le deuxième pays le plus touché par le virus, la DGT a publié vendredi 28 février un questions/réponses sur la conduite à tenir, à destination des employeurs et des salariés. Présentation des principales recommandations de la DGT.
Aménagement du poste de travail ou des conditions de travail
La DGT rappelle que compte tenu de son obligation d’assurer la santé et la sécurité des salariés dans son entreprise, l’employeur doit différer les déplacements des salariés qui ne sont pas justifiés par un motif impératif, dans les zones à risque dont la liste est régulièrement mise à jour par le Gouvernement sur son site Internet dédié, gouvernement.fr/info-coronavirus.
La DGT préconise également la mise en œuvre d’un certain nombre de mesures à l’égard des salariés qui reviennent de zones à risques ou qui ont été en contact avec des personnes infectées pendant les 14 jours suivant leur retour. Il peut s’agir de la mise en place du télétravail lorsque les fonctions du salarié le permettent. A défaut, l’employeur devra faire en sorte que le salarié ne soit pas en contact avec des personnes fragiles, n’assiste qu’aux réunions indispensables et qu’il évite les contacts proches (cantines, ascenseurs, etc.).
Si le risque épidémique peut, comme le rappelle le document de la DGT, justifier le recours au télétravail sans l’accord du salarié, il semble préférable à ce stade de recueillir l’accord exprès du salarié compte tenu de la difficulté pour l’employeur d’apprécier l’existence ou non d’une menace d’épidémie.
Parmi les autres solutions préconisées, la DGT prévoit la possibilité pour l’employeur de déplacer les congés déjà posés par le salarié sur une autre période pour couvrir la période de 14 jours. En revanche, il ne peut imposer au salarié des congés que celui-ci n’a pas prévus. Il peut également placer sur ces jours, les jours de repos (JR) ou de réduction du temps de travail (JRTT) si l’accord collectif qui les a institués les laisse à sa libre disposition.
Suspension du contrat de travail
Dans le cas où le poste de travail ne peut être aménagé pour limiter les contacts et si le télétravail n’est pas compatible avec l’activité, le salarié pourra rester à son domicile :
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- si le salarié ou son enfant (circulaire CNAM, 19 février 2020) fait l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile pour laquelle un médecin de l’agence régionale de santé (ARS) a établi un certificat d’arrêt de travail ; le salarié bénéficie des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS), sans application du délai de carence de 3 jours et même s’il ne remplit pas les conditions d’ouverture de droit, pendant une durée maximale de 20 jours. Ces mesures instituées par le décret n°2020-73 du 31 janvier 2020 sont applicables du 1er février au 31 mars 2020 ;
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- si l’employeur demande au salarié de rester à son domicile et que celui-ci ne bénéficie pas d’un arrêt de travail établi par le médecin de l’ARS, sa rémunération est maintenue et la période d’absence, assimilée à du temps de travail effectif, lui ouvre les mêmes droits qu’aux salariés présents dans l’entreprise.
Réduction ou augmentation des durées du travail
Le questions/réponses précise que la crise sanitaire actuelle constitue une circonstance exceptionnelle autorisant l’employeur à recourir au dispositif d’activité partielle. Sont ainsi éligibles à une demande d’activité partielle les situations suivantes : la fermeture administrative d’un établissement, l’interdiction de manifestations publiques à la suite d’une décision administrative, l’absence massive de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise, l’interruption temporaire des activités non essentielles, la suspension des transports en commun par décision administrative, la baisse d’activité liée à l’épidémie.
Ce dispositif permet aux salariés qui subissent une perte de salaire du fait de la fermeture temporaire de l’établissement ou de la réduction de l’horaire de travail en deçà de l’horaire habituellement pratiqué, de bénéficier d’une indemnité compensatrice versée par l’employeur et correspondant à 70 % de sa rémunération antérieure brute (portée à 100 % s’il suit une formation pendant cette période). L’employeur peut alors en demander le remboursement partiel à l’Etat. La demande d’activité partielle doit être adressée au préfet en amont du placement des salariés en activité partielle. La décision de refus ou d’autorisation est notifiée à l’employeur dans un délai de 15 jours à compter de sa réception.
Il est également rappelé qu’il est possible, sous certaines conditions, de déroger aux durées maximales de travail et aux repos dans des situations d’urgence sur des périodes limitées après information de l’inspection du travail.
Autres précisions
Le questions/réponses précise qu’en situation de crise l’exercice du droit de retrait par un salarié est fortement limité dès lors que l’employeur a pris les mesures de prévention et de protection nécessaires, conformément aux recommandations du Gouvernement (gouvernement.fr/info-coronavirus). En effet, les conditions d’exercice de ce droit n’autorisent le salarié à se retirer d’une situation de travail que s’il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Le document rappelle qu’en présence d’un exercice abusif du droit de retrait, l’employeur peut opérer une retenue sur le salaire du salarié correspondant à la période d’inexécution du travail et peut engager une procédure de licenciement. Enfin, le questions/réponses rappelle que le comité social et économique (CSE) devra être consulté avant toute mesure de modification importante de l’organisation du travail, de recours à l’activité partielle et de dérogations aux règles relatives à la durée du travail et aux repos. Il pourra également :
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- être réuni à la demande motivée de deux de ses membres sur des sujets relevant de la santé, de la sécurité ou des conditions de travail ;
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- ou exercer son droit d’alerte si l’un de ses membres constate qu’il existe une situation de danger grave et imminent. L’employeur procède alors immédiatement à une enquête.
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