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Congés payés et maladie : le projet de texte adopté par l’Assemblée nationale

Congés payés et maladie : le projet de texte adopté par l’Assemblée nationale

Après que la Cour de cassation a décidé en septembre dernier, sur le fondement de la jurisprudence de la CJUE, que les salariés en arrêt de travail pour maladie ou accident, professionnel ou non, acquièrent des congés payés pendant cette période sans limitation de durée, le Gouvernement a sollicité l’avis du Conseil d’Etat sur la mise en conformité du droit national avec le droit de l’Union européenne.

 

Dans son avis rendu le 13 mars 2024, le Conseil d’Etat a donné au Gouvernement son feu vert sur les points suivants :

 

⇒ limiter à 4 semaines, le total des droits à congés payés susceptibles d’être acquis pendant des périodes d’absences pour maladie ou accident non professionnel , pour le passé comme pour l’avenir ;

 

⇒ prévoir l’extinction automatique des droits à congés acquis sur plusieurs périodes d’acquisition successives, à la fin de la période de report, y compris dans le passé ;

 

⇒ imposer aux salariés dont le contrat de travail est toujours en cours un délai de forclusion faisant obstacle à ce que des demandes puissent être présentées sans limitation de durée aux employeurs qui n’ont pas informé leurs salariés sur l’étendue de leur droit à congé.

 

Le vendredi 15 mars 2024, le Gouvernement a déposé un projet de texte sous la forme d’un amendement au projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (DDADUE).

 

Ce projet de loi incluant l’amendement, voté sans modification (devenu l’article 32 bis nouveau), relatif aux congés payés a été adopté le 18 mars 2024 par l’Assemblée nationale.

 

Premier point d’étape sur le contenu de cet amendement.

 

 

Acquisition de congés payés pendant un arrêt de travail pour accident ou maladie, professionnel ou non, sans limitation de durée

 

L’article L.3141-5 du Code du travail qui énumère les périodes assimilées à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée du congé est modifié comme suit :

 

⇒ la limite d’une durée ininterrompue d’un an pour l’acquisition de congés payés par un salarié dont le contrat de travail est suspendu pour accident du travail ou maladie professionnelle est supprimée ;

 

⇒ les périodes pendant lesquelles l’exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d’arrêt de travail lié à un accident ou une maladie n’ayant pas un caractère professionnel sont, dorénavant, également prises en compte pour la détermination de la durée du congé.

 

 

Limitation à quatre semaines de la durée du congé acquis pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel

 

Par une disposition nouvelle, le projet de texte prévoit de limiter à quatre semaines la durée maximale de congés payés à laquelle peut prétendre un salarié en arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel pendant toute la période d’acquisition des congés payés.

 

Le salarié acquiert donc, durant son absence, deux jours ouvrables par mois dans la limite de 24 jours ouvrables par période de référence.

 

Cette disposition ne s’applique qu’aux arrêts de travail de droit commun. Les salariés en arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle continuent donc d’acquérir cinq semaines de congés payés en cas de suspension du contrat de travail pendant la totalité de la période d’acquisition des congés payés.

 

Fixation d’une période de report pour les congés payés qui n’ont pu être pris avant la fin de la période de prise en raison d’un arrêt de travail pour maladie ou accident, professionnel ou non

 

Le salarié qui a été empêché, pour cause d’arrêt de travail pour maladie ou accident, de prendre tout ou partie des congés payés acquis au cours de la période de prise, bénéficie d’une période de report de 15 mois pour pouvoir les utiliser. Un accord collectif peut fixer une période de report plus longue que celle prévue par la loi.

 

Cette période de report débute à la date à laquelle le salarié reçoit, postérieurement à sa reprise du travail, l’information de l’employeur portant sur le nombre de jours de congés dont il dispose et la date jusqu’à laquelle ces congés peuvent être pris.

 

Application de la période de report au terme de la période d’acquisition des congés payés en cas d’absence perdurant depuis au moins un an

 

Par dérogation à la règle selon laquelle la période de report débute lors de l’information reçue par le salarié postérieurement à sa reprise du travail, lorsque le contrat de travail est suspendu en raison de la maladie ou de l’accident depuis au moins un an à la fin de la période d’acquisition des congés payés, les congés payés acquis durant cette période peuvent être reportés également sur une période de 15 mois mais qui débute, quant à elle, à compter du terme de la période d’acquisition.

 

Cette disposition permet l’extinction automatique du droit à congés pour les congés payés acquis pendant un arrêt de travail lorsque celui-ci se prolonge au-delà du terme de la période de report, afin d’éviter un cumul illimité de congés payés.

 

Si, lors de la reprise du travail, la période de report n’est pas encore expirée, celle-ci est suspendue jusqu’à ce que le salarié ait reçu les informations sur le nombre de jours de congés dont il dispose et la date jusqu’à laquelle ils peuvent être pris.

 

Information du salarié à l’issue d’un arrêt de travail pour maladie ou accident

 

A l’issue d’un arrêt de travail pour maladie ou accident, l’employeur devra informer le salarié dans les 10 jours qui suivent la reprise du travail :

 

    • du nombre de jours de congés dont il dispose ;
    • de la date jusqu’à laquelle ces congés peuvent être pris.

 

Cette information devra être communiquée au salarié par tout moyen conférant une date certaine à sa réception.

 

Cette règle s’appliquera aussi bien aux congés payés acquis avant que pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident.

 

Détermination des modalités de calcul de l’indemnité de congés payés

 

Pour le calcul du dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié pendant la période de référence, les périodes d’arrêt de travail pour maladie ou accident de droit commun assimilées à un temps de travail effectif, sont prises en compte dans la limite de 80% de la rémunération associée à ces périodes (en cohérence avec la limitation du droit à congés payés à 24 jours ouvrables).

 

Dispositions applicables pour les congés payés acquis au cours de périodes passées d’arrêt de travail pour maladie ou accident  

 

Application rétroactive de la loi aux situations passées

 

Les dispositions prévues par la loi nouvelle sont applicables aux congés payés acquis pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel entre le 1er décembre 2009 et sa date d’entrée en vigueur pour les salariés encore en activité.

 

Ces dispositions s’appliqueront sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée ou de stipulations plus favorables en vigueur à la date d’acquisition des droits à congés.

 

Sont notamment concernées les dispositions suivantes :

 

⇒ acquisition de congés payés dans la limite de 2 jours ouvrables par mois et de 24 jours ouvrables par an pour maladie ou accident de droit commun ;

 

⇒ instauration d’une période de report des congés payés de 15 mois à compter de l’information que doit recevoir le salarié à sa reprise du travail ;

 

⇒ extinction automatique du droit aux congés payés acquis pendant l’arrêt de travail à l’expiration d’un délai de report de 15 mois courant à compter de la fin de la période d’acquisition de ces congés lorsque, à cette date, le contrat de travail est suspendu depuis au moins un an.

 

Ces dispositions devraient permettre d’éteindre en partie le droit aux congés payés des salariés qui ont été absents pour maladie ou accident pendant plusieurs périodes consécutives antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi et qui pouvaient, du fait de l’absence de délai de report prévu par le droit national, cumuler ces droits sans limitation de durée.

 

En outre, les salariés qui, bien qu’ayant été placés en arrêt de travail pour maladie ou accident non professionnel, ont déjà acquis 24 jours ouvrables de congés payés sur une période d’acquisition des congés, ne peuvent pas revendiquer de congés supplémentaires au titre de leurs arrêts de travail.

 

De la même façon les salariés qui ont acquis au titre de leur travail effectif 20 jours de congés payés, par exemple, ne pourront revendiquer que 4 jours au titre d’un arrêt de travail quelle qu’en soit la durée.

 

Cette disposition d’écrêtement ne s’applique que pour la période comprise entre le 1er décembre 2009 et la publication de la loi.

 

Fixation d’un délai de forclusion de deux ans pour demander l’octroi de jours de congés pour les salariés dont le contrat de travail est en cours

 

Les salariés dont le contrat de travail est en cours d’exécution peuvent revendiquer l’octroi de jours de congés payés acquis au titre d’un arrêt de travail pour maladie ou accident professionnel ou non depuis le 1er décembre 2009, sous réserve du dispositif d’écrêtement décrit ci-dessus.

 

Le projet de texte prévoit que ces salariés disposent d’un délai maximum de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour agir en exécution du contrat de travail.

 

Application de la prescription triennale applicable en matière de salaires pour les salariés dont le contrat est rompu

 

Les salariés dont le contrat de travail est rompu peuvent demander une indemnité compensatrice de congés payés pour les congés qu’ils ont acquis pendant un arrêt de travail pour maladie ou accident, professionnel ou non, et qu’ils n’ont pas pu prendre avant la rupture de leur contrat de travail.

 

La demande portant sur le versement d’une telle indemnité est soumise à la prescription des salaires régie par les dispositions de l’article L.3245-1 du Code du travail qui dispose que :

 

« L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat».

 

En conséquence, les salariés dont le contrat de travail est rompu depuis plus de trois ans ne seraient plus fondés à agir en justice pour demander le paiement d’une indemnité compensatrice au titre de ces congés.

 

En résumé, le texte tel qu’adopté par l’Assemblée nationale prévoit :

 

♦ l’acquisition de congés payés pendant l’arrêt de travail pour maladie ou accident quelle qu’en soit la durée, dans la limite de 4 semaines par période de référence pour les arrêts de travail pour accident ou maladie non professionnel et un ajustement en conséquence des modalités de calcul de l’indemnité de congés payés ;

 

♦ l’obligation d’informer le salarié dans les dix jours suivant le terme de l’arrêt de travail sur le nombre de jours de congés dont il dispose et de la date jusqu’à laquelle ils peuvent être pris ;

 

♦ une période de report de 15 mois pour les salariés qui n’ont pu prendre leurs congés payés du fait de leur arrêt de travail pour maladie ou accident, à compter de l’information de l’employeur postérieure à la reprise du travail ;

 

♦ la fixation du début de la période de report de 15 mois à la fin de la période d’acquisition des congés si, à cette date, l’absence pour maladie ou accident perdure depuis au moins un an ;

 

♦ l’application rétroactive de la limite d’acquisition de 4 semaines de congés payés et de la période de report de 15 mois aux arrêts de travail pour maladie ou accident non professionnel entre le 1er décembre 2009 et l’entrée en vigueur de la loi ;

 

♦ un délai de forclusion de deux ans à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour que les salariés, dont le contrat de travail est en cours, puissent demander l’octroi de congés payés ;

 

♦ l’extinction du droit à l’indemnité compensatrice pour les salariés dont le contrat de travail est rompu depuis plus de trois ans.

 

L’ensemble du projet de loi DDADUE doit maintenant faire l’objet d’un examen en Commission mixte paritaire. L’agenda parlementaire prévoit une adoption définitive de l’ensemble du projet de loi le 9 avril 2024 au Sénat, puis le 10 avril 2024 à l’Assemblée nationale.

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